Allemagne d'aujourd'hui, n°179/janvier - mars 2007

15e anniversaire du « Triangle de Weimar »
First Edition

Specifications


Publisher
Presses Universitaires du Septentrion
Imprint
Association pour la Connaissance de l'Allemagne d'Aujourd'hui
Title Part
Numéro 179
Journal
Allemagne d'aujourd'hui | n° 179
ISSN
00025712
Language
French
Publisher Category
Septentrion Catalogue > Humanities and other civilisations > Germanic and Scandinavian countries
Publisher Category
Septentrion Catalogue > Humanities and other civilisations
Title First Published
12 March 2007

Paperback


Publication Date
12 July 2007
ISBN-13
9782859399870
Code
1032
Weight
215 grams
List Price
11.00 €
ONIX XML
Version 2.1, Version 3

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Excerpt


Konkret et Junge Welt : clivage est-ouest dans la presse allemande d’extrême gauche ou émergence d’une nouvelle identité ?

Abstract D. Herbet

Seventeen years after the reunification of Germany, the politicians, the media and the intellectuals are still facing the issue of "eastalgia", that is to say a specifically Eastern mentality, an Eastern vote. In this respect, the survival of the daily "Junge Welt" prove to be symptomatic in spite of its small circulation (about 15 000 copies). This daily was the official paper of the Free German Youth (FDJ) from 1947 to 1989. This surprising phenomenon raises the following question, 'Did the reunification help reinforce and unify the far left?' The magazine "Konkret", whose editor once was the terrorist Ulrike Meinhof and which was subsidized by the Socialist Unity Party (SED), is yet another emblematic case. The quest for a german identity common to both East and West Germans should have had greater chance to succeed at the left of the left. From these examples the reciprocal influences and the evolution in the press since 1990 can be analysed. It so appears that the far left media not only still illustrate a divide within the German society, rooted in the heritage of the former German Democratic Republic, but that they also contribute to the birth of a new German identity at far left.

Résumé

Junge Welt et Konkret, clivage Est/Ouest dans la presse allemande d'extrême gauche ou émergence d’une nouvelle identité?

Dix-sept ans après l’Unification de l’Allemagne, les hommes politiques, les intellectuels et les médias se trouvent encore confrontés à la question de l’ " ostalgie ". Il existerait une mentalité spécifique à l’Est, tout comme un vote de l’Est. A cet égard, la survie du quotidien junge Welt s’avère symptomatique malgré un faible tirage, de 15 000 exemplaires environ. Le journal fut en effet l’organe officiel de la FDJ. Ce phénomène étonnant amène à se demander si l’Unification a pu renforcer et unifier l’extrême gauche. Par ailleurs, le mensuel ouest-allemand Konkret, dont la terroriste Ulrike Meinhof fut rédactrice en chef et qui fut subventionné par le SED, représente un autre cas emblématique et son histoire est liée à celle du junge Welt. Or politiquement, la quête d’une identité allemande commune aux Allemands de l’Est et de l’Ouest aurait dû avoir plus de chances d’aboutir à la gauche de la gauche. A partir des liens entre ces deux publications ou entre leurs collaborateurs, il est possible de proposer une analyse de l’évolution de cette question depuis 1990. Il apparaît que la presse d’extrême gauche reflète encore un clivage au sein de la société allemande, clivage qui tire ses racines de l’héritage de l’ancienne RDA, mais qu’elle favorise aussi l’émergence d’une nouvelle identité allemande à gauche de la gauche.

Zusammenfassung

Konkret und junge Welt: gibt es eine Kluft zwischen westdeutscher und ostdeutscher Presse oder entsteht eine neue deutsche Identität im linksradikalen Spektrum?

Siebzehn Jahre nach der Vereinigung scheint das Phänomen Ostalgie noch fortzudauern. Für Politiker, Intellektuellen und Medien gibt es eine typisch östliche Mentalität, sowie ein typisches Wahlverhalten. Dafür ist das Überleben der Zeitung junge Welt durchaus bezeichnend, obwohl er nur eine Auflage von circa 15 000 Exemplaren hat. Sie war ja das offizielle Organ der FDJ zwischen 1947 und 1989. Daher darf man sich fragen, ob das linksradikale Lager nach der Vereinigung Zuwachs verzeichnen konnte. Das westdeutsche Magazin Konkret erweist sich in dieser Hinsicht auch als sehr charakteristisch, da Ulrike Meinhof Chefredakteurin von Konkret war und die Zeitschrift übrigens auch von der SED subventioniert wurde. Auf der Suche nach einer gemeinsamen deutschen Identität hätten die Linksradikalen normalerweise die besseren Chancen gehabt. Es gab Kontakte zwischen beiden Medien, Einflüsse sogar. Nach grundlegender Analyse muss der Leser noch grundsätzliche Unterschiede in der Berichterstattung feststellen, die mit der Auseinandersetzung mit dem Erbe der ehemaligen DDR zu tun haben. Die junge Welt fördert aber auch deutlicher die Entstehung einer neuen gemeinsamen Identität links der SPD.


Actualité sociale : La loi anti-tabac : victime du fédéralisme ?

Avec un certain retard par rapport à d'autres pays, l’Allemagne commence à s’intéresser à la protection des non-fumeurs. Mais, comme pour toute décision à prendre par la grande coalition – un des meilleurs exemples étant la réforme de la santé, voir ci-dessous –, la mise en œuvre d’une interdiction totale ou partielle de fumer dans les lieux publics risquait d’être laborieuse. La querelle fumeurs contre non-fumeurs en a apporté la preuve. Le gouvernement avait commencé par mettre en place un groupe de travail chargé de l’élaboration d’un projet de protection des non-fumeurs. Celui-ci a émis des propositions allant loin dans l’interdiction de fumer dans les lieux publics, trop loin, de l’avis du ministre de l’Economie, Michael Glos, qui aurait préféré s’en tenir à une obligation librement consentie (freiwillige Selbstverpflichtung), notamment de la part des restaurateurs. Bien qu’il n’ait pas été le seul à soutenir cette solution, le gouvernement s’est rangé derrière l’avis du groupe de travail qui donnait la priorité à la protection des non-fumeurs. Il a élaboré un compromis qui, sans aller jusqu’à interdire le tabac dans tous les lieux publics, suivait assez fidèlement les recommandations des experts. Le projet prévoyait l’interdiction totale de fumer dans tous les bâtiments et transports publics, les hôpitaux et les écoles. Cette interdiction devait s’appliquer également aux restaurants, mais de façon partielle seulement, car il aurait été possible de continuer à fumer dans des salles annexes qui ne communiquent pas avec la salle principale. L’interdiction ne devait pas s’appliquer, pas encore du moins, aux bistrots, aux bars et aux tentes qui servent de débit de bière, telles que celles de l’Oktoberfest à Munich Le projet prévoyait parallèlement que la vente de tabac serait interdite aux moins de 18 ans, contre 16 ans aujourd’hui.

Bien que les nouvelles dispositions soient moins contraignantes que celles adoptées par d’autres pays, notamment l’Irlande, l’Ecosse et l’Italie, les protestations ont afflué. Moins de la part des producteurs allemands de tabac, majoritairement situés dans le Land de Brandebourg, qui ne produisent que partiellement pour le marché allemand, que de la part des fabricants de cigarettes, dont la puissante association VDC (Verband der Cigarettenindustrie) s’est livrée à un lobbying tous azimuts, soutenue par les professionnels de la restauration qui craignaient une chute de leur chiffre d’affaires. Un autre groupe qui se sentait lésé est celui des propriétaires de distributeurs de cigarettes. D’une part, ils ne se voyaient pas maintenir des distributeurs dans les locaux tels que les restaurants, où l’interdiction serait effective ; d’autre part, ils étaient très mécontents des tergiversations du gouvernement, ou des gouvernements successifs ; les distributeurs viennent d’être équipés de lecteurs de cartes à puce pour que les jeunes de moins de 16 ans ne puissent plus, à partir du 1er janvier 2007, y acheter des cigarettes – et maintenant, ils se voyaient sous la menace d’une interdiction de vendre des cigarettes aux moins de 18 ans, rendant du coup caduque une bonne partie des distributeurs.

Mais voilà, la prise de décision dans une grande coalition est très difficile. La loi anti-tabac est morte avant d’être née. Le gouvernement l’a en effet retirée à la demande de Wolfgang Schäuble, ministre de l’Intérieur, et de Brigitte Zypries, ministre de la Justice. Invoquant la Constitution, ils estiment que l’Etat fédéral, en imposant une loi nationale sur la protection des fumeurs, empiète sur les prérogatives des Länder. Les Länder, quant à eux, sont loin d’avoir tous la même vision des choses : la Bavière, par exemple, soutient une interdiction totale, alors que la Sarre refuse de légiférer. Le gouvernement a botté en touche : s’étant ainsi opportunément débarrassé d’un sujet qui fâche, le gouvernement envisage désormais de concevoir une loi anti-tabac " light " qui ne s’appliquerait qu’aux seuls bâtiment fédéraux. Les non-fumeurs allemands ne verront pas de sitôt une réglementation nationale telle qu’elle existe pourtant dans de nombreux pays européens, dont la France, où la loi anti-tabac entre en vigueur le 1er février 2007. Fin février, on s’orientait pourtant vers un compromis négocié par les Länder, les Länder de Rhénanie du Nord – Westphalie et de Basse-Saxe menaçant cependant de préserver quelques exceptions pour les restaurateurs.

Menaces sur la réforme de la santé

Le système de santé allemand coûte trop cher et il est inefficace. Avec des dépenses se montant à 10,9% du PIB en 2004, plus que tous les pays européens comparables (France : 10,5%, ce qui est aussi très élevé) et des performances se situant au mieux à une petite moyenne européenne, le gouvernement Merkel avait assigné une priorité haute à la réforme du système de santé prévu dans son programme gouvernemental. L’objectif principal était l’abaissement des coûts de la sécurité sociale pour mettre un frein à l’augmentation continue des cotisations à l’assurance-maladie qui plombent les finances des entreprises et pèsent sur l’emploi. Un des piliers de la réforme, voire le plus important, fut l’idée de créer une prime forfaitaire par assuré qui permettrait de découpler les coûts de la santé des coûts de l’emploi. En outre, les recettes et les dépenses étant plus facilement identifiables, le nouveau système devait permettre l’accroissement de la concurrence entre les diverses caisses d’assurances.

Après de multiples négociations entre les partenaires de la grande coalition est né le Fonds santé (Gesundheitsfonds) que les Allemands continueront à alimenter selon le niveau de leur revenu, comme par le passé, mais le Fonds est censé calculer à partir des cotisations différenciées une prime forfaitaire unique par assuré qui sera transférée aux caisses d’assurance. Or l’idée initiale, déjà amputée du principe d’une cotisation forfaitaire, risque de ne pas voir le jour en raison de l’opposition de certains Länder. Suite à une étude de l’Institut de l’analyse de micro-données de Kiel (Institut für Mikrodaten-Analyse) rendue publique en décembre 2006, il semblerait que l’introduction du Fonds de santé, initialement prévue pour janvier 2008, risque de conduire à des transferts financiers très importants de certains Länder de l’ouest vers les Länder plus pauvres, notamment ceux de l’Est. L’Institut chiffre à 3,84 milliards d’euros par an les transferts qui devraient s’opérer dans le cadre du Fonds de santé. Les pays donateurs seraient le Bade-Wurtemberg (1,61 milliard _), la Bavière (1,04) la Hesse (0,7), la Basse-Saxe (0,34) et Hambourg (0,14). Les onze autres Länder seraient tous bénéficiaires de ce transfert, notamment la Saxe, qui recevrait 1,31 milliard d’euros à elle toute seule.

Cette perspective, inacceptable pour les Länder concernés, notamment le Bade-Wurtemberg et la Bavière, qui sont déjà les plus gros contributeurs dans le cadre de la péréquation financière régionale, risque de sonner le glas du Fonds de santé, et partant, de la réforme de santé dont c’était la pièce maîtresse. Les manœuvres ont déjà commencé : la date de mise en vigueur du Fonds prévue pour le début de l’année 2008 a été repoussée à janvier 2009, car en 2008, Roland Koch et Edmund Stoiber souhaitent défendre leur majorité absolue au Parlement de leur Land ; mais, en 2009, c’est Angela Merkel qui devra entrer en lice pour conquérir une majorité plus confortable au Bundestag. Il est peu probable qu’elle veuille alourdir son bilan par une mesure si véhémentement combattue par certains de ses barons les plus puissants. Entre-temps, la ministre de la Santé, Ulla Schmidt, a commandité une contre-expertise des coûts du Fonds santé pour désamorcer la fronde des ministre-présidents chrétiens-démocrates et pour tenter de sauver une réforme considérée comme un pilier de la politique de la grande coalition. Signe des difficultés à trouver un compromis porteur mais aussi de l’esprit de décision de la chancelière qui ne pouvait souffrir un échec dans ce domaine, le 2 février, le Bundestag a adopté une ultime version par 378 voix contre celles de l’opposition mais aussi de 23 députés chrétiens-démocrates et de 20 députés sociaux-démocrates.

Du nouveau dans la politique familiale en 2007

Le Bundesrat ayant lui aussi donné le feu vert à la nouvelle loi sur l’allocation et le congé familiaux (Bundeseltern- und Elternzeitgesetz), rien ne s’oppose plus à l’introduction de la nouvelle réglementation. Le vieillissement accéléré de la société allemande avec son cortège de problèmes annoncés – financement des retraites et des dépenses de santé, recul du dynamisme économique, etc. – a en effet conduit le gouvernement à accorder une place plus importante à la politique familiale que par le passé. C’est pourquoi il a décidé d’introduire une nouvelle réglementation du congé parental pour les parents d’enfants nés à partir du 1er janvier 2007. Le niveau de cette prestation qui se substitue à l’ancienne allocation dépend des revenus des parents, mais elle est nettement plus généreuse que l’allocation éducation versée auparavant, 25.200 _ au maximum au lieu de 7.200 _ sur l’année. Versée pendant 12 mois après la naissance de l’enfant, l’allocation atteint au moins 300 _, même si les parents, avant la naissance de l’enfant, n’ont perçu aucun revenu de leur travail. Si le parent qui s’occupe de l’enfant renonce à son emploi pour s’occuper du bébé, l’allocation se monte à 67 % du revenu mensuel net atteint en moyenne pendant l’année qui précède la naissance de l’enfant jusqu’à un montant maximal de 1800 _. L’allocation est compatible avec un emploi à temps partiel ne dépassant pas 30 heures par semaine. Sachant qu’habituellement c’est la mère qui accepte de se retirer de son emploi pour s’occuper de l’enfant nouveau-né, la ministre de la Famille, Ursula von der Leyen, a instauré le versement de deux mensualités supplémentaires si le père de l’enfant accepte de s’en occuper aussi pendant ce laps de temps.

En raison du battage médiatique autour de cette réforme et de la bonne information du public qui en résulte, un problème médical est apparu à la fin de l’année 2006 : selon la date de naissance de l’enfant, avant ou après le 31 décembre, la mère va bénéficier de l’allocation éducation de 7.200 _, ou de la nouvelle allocation du congé parental qui est plus de trois fois plus généreuse. En conséquence, de futures mères souhaitaient retarder la naissance de leur bébé pour qu’il vienne au monde en 2007 et non en 2006, avec des risques de santé pour le nouveau-né dont elles ne mesurent pas toujours les conséquences…

En annonçant cette mesure, le gouvernement a souligné sa volonté de contribuer à une meilleure conciliation entre famille et profession. Encourager les salariés à se retirer du marché du travail pour s’occuper des enfants ne semble pas être la meilleure manière d’y parvenir, comme le montrent les exemples français et scandinaves où un taux d’activité féminin soutenu se conjugue avec un niveau de fécondité nettement plus élevé. La grande coalition est plus convaincante avec une autre mesure en faveur des familles, destinée cette fois à améliorer la prise en charge des enfants de moins de trois ans, domaine où l’Allemagne, notamment les Länder de l’Ouest, est notoirement sous-équipée. Elle propose de subventionner les communes, habituellement en charge des crèches, à hauteur de 1,5 milliard d’euros par an pour améliorer l’offre de prise en charge des tout petits. Elle propose également la mise à disposition de 4 milliards d’euros par an pour améliorer l’offre d’écoles ouvertes toute la journée – au lieu d’une ouverture pendant la seule matinée, ce qui est encore la règle actuellement – afin d’encourager les mères à prendre ou reprendre un emploi.

Une autre initiative, lancée par le gouvernement en 2006, concerne la création de " maisons intergénérationnelles ". Le deuxième appel d’offres qui commence en 2007 vise le choix de 439 maisons, une par circonscription, qui obtiendra 40.000 _ de subvention par an pendant cinq ans. Vu le faible niveau de la subvention, le programme ne porte que sur des projets déjà existants. Servant au départ de jardin d’enfant ou de maison de retraite, ces maisons intergénérationnelles, pour être soutenues, doivent satisfaire aux trois fonctions souhaitées par l’Etat : garder des enfants, proposer des ateliers pour les seniors et servir de café-rencontre. Les activités proposées sont gratuites – contrairement aux jardins d’enfants habituels qui sont payants – parce que le personnel d’encadrement est ou bénévole ou payé sur la base d’un mini-job (400 _ par mois). Sans vouloir se substituer aux écoles maternelles ou aux maisons de retraite, ces nouveaux lieux d’échanges devraient permettre aux jeunes et aux moins jeunes de garder le contact avec les autres générations.

La tragédie d’Emsdetten et la remise en question des jeux violents sur ordinateur

Le lundi 20 novembre 2006, un ancien élève du collège Geschwister-Scholl-Realschule à Emsdetten, petite ville de Rhénanie-du-Nord/Westphalie, a blessé cinq personnes à l’extérieur et à l’intérieur de l’établissement avant de se donner la mort. Très lourdement armé, il avait probablement prévu de procéder à un carnage tel que celui perpétré en 2002 à Erfurt, où un élève a tué 16 personnes de son école, ou celui de la Columbine High School in Littleton, USA, une catastrophe d’une ampleur équivalente. Le jeune homme, réputé pour être un solitaire, avait longuement planifié l’attentat. Il l’avait même, semble-t-il, annoncé sur Internet. Si ce fait divers, qui aurait pu se terminer de façon plus tragique qu’il ne l’a été, a suscité un telle émotion auprès de la population, c’est qu’il relance, quatre ans après la tuerie d’Erfurt, la polémique autour des jeux violents sur ordinateur. L’ancien élève du collège d’Emsdetten était en effet réputé pour avoir été accro aux jeux meurtriers qualifiés de Killerspiele, tel que notamment le jeu Counterstrike.

Dans la foulée de cette fusillade, de nombreuses personnalités politiques, notamment de la CDU mais aussi du SPD, ont appelé à prendre des mesures énergiques. Les propositions vont de modifications de la loi sur la protection de la jeunesse – les limites d’âge, par exemple, pour acheter certains jeux – à l’interdiction pure et simple de la vente de " Killerspiele " et l’introduction de filtres pour contrer la diffusion de ce type de jeux sur Internet. L’opinion publique soutient clairement cette position. Un récent sondage publié dans l’hebdomadaire Der Spiegel (48/2006), donne 69 % de réponses positives à la question : " Est-ce que des jeux sur ordinateur ou vidéo qui glorifient la violence devraient être interdits ? " Les débats animés suscités par cette affaire sur des forums Internet font néanmoins état de positions plus nuancées et soulèvent un certain nombre de questions : comment un élève a-t-il pu se procurer autant d’armes meurtrières ? Comment se fait-il que personne dans son école ne se soit aperçu de ses tendances destructrices ? A ce propos, il a été souligné que l’Allemagne est en queue de peloton des pays de l’OCDE pour le nombre de psychologues dans les établissements scolaires.

L’association USK (Unterhaltungssoftware Selbstkontrolle), émanation des producteurs de jeux vidéo chargée de surveiller la conformité de leurs logiciels aux règlements existants, souligne pour sa part que son action est étroitement contrôlée par les pouvoirs publics, les représentants des Eglises et des médias. L’USK estime que la protection de la jeunesse allemande est d’un niveau plus élevé que dans la plupart des autres pays européens, avec, notamment, des limites d’âge plus élevés pour la vente de jeux vidéo.

Au-delà de l’appel à l’interdiction de jeux violents, qui paraît de toute manière difficile à réaliser, ce débat est le signe d’une inquiétude réelle de la société face au phénomène des mondes virtuels dans lesquels se réfugient de plus en plus d’élèves mal à l’aise dans leur école où le risque d’être victime d’actions de mobbing s’accroît. Dans une société de plus en plus complexe, de plus en plus compétitive, la tentation est grande de se créer un monde virtuel qu’on domine, où on est une espèce de maître au-dessus des lois et des usages. Wolfgang Schäuble, ministre de l’Intérieur, qui n’est pas en faveur d’une interdiction des jeux violents, estime que les parents devraient regarder de plus près ce que font leurs enfants devant l’ordinateur. Mais seront-ils capables de reprendre la main dans un domaine investi par les enfants ?

- Brigitte LESTRADE -
Brigitte.Lestrade@u-cergy.fr


15e anniversaire du Triangle de Weimar 1991-2006 - Documentation

AA n'a cessé de s’intéresser ces dernières années au Triangle de Weimar auquel elle a consacré deux importants dossiers : Le 'Triangle de Weimar’ a dix ans. Les relations franco-germano-polonaises des Etats et des Régions in AA, No 158 (oct.-déc. 2001), un dossier de 115 pages réalisé avec le concours de l’OFAJ ; La France et l’Allemagne face à l’ouverture de l’Union européenne. La portée du ‘Triangle de Weimar’ in AA No 171 (janvier-mars 2005), un dossier de 100 pages réalisée à partir de journées d’études organisées dans les universités de Bordeaux 3 et de Lille 3. En août 2006, le Triangle de Weimar a fêté son 15ème anniversaire. A cette occasion, à l’initiative du Comité pour la promotion de la coopération entre la France, la Pologne et l’Allemagne (http://www.weimarer-dreieck.com), présidé par Klaus-Heinrich Standke, les trois ministres des Affaires étrangères, H.-D. Genscher, R. Dumas et K. Skubiszewski, qui en ont été les initiateurs, se sont retrouvés à Weimar, dans la même salle de l’Hôtel de ville où ils fondèrent en 1991 le Triangle de Weimar, pour rappeler les conditions de la création de cette instance trilatérale, évoquer ses évolutions et évaluer ses perspectives d’avenir. Nous reproduisons ci-dessous leurs discours ainsi que les introductions faites par K.-H. Standke et B. Geremek.
- A.A. -

Klaus-Heinrich STANDKE

Hier soir, Daniel Barenboim a dit au Théâtre national de Weimar, non sans arrière-pensée, que " parfois il est plus facile de faire l’impossible que ce qui est difficile ". Peut-être pensait-il au Triangle de Weimar ? […] Il y a quinze ans, le 29 août 1991, dans cette même salle, les trois pères fondateurs ici présents, R. Dumas, H.-D. Genscher et K. Skubiszewski, ont présenté leur idée de créer le Triangle de Weimar sous la forme d’une Déclaration commune des ministres des Affaires étrangères français, polonais et allemand sur " la responsabilité de la France, de la Pologne et de l’Allemagne dans l’avenir de l’Europe " 1, une déclaration qui mérite aujourd’hui encore d’être lue.
Le message du Triangle de Weimar de 1991, la vision qu’il a alors développée, qui est en partie devenue réalité, mais qui n’est pas achevée, reste aujourd’hui comme hier valable. En voici deux phrases : " Nous avons désormais la chance unique de faire progresser la nouvelle Europe en assumant une responsabilité commune dans un esprit de solidarité humaine et avec le sentiment d'appartenir à une communauté de destin ainsi qu'en nous appuyant sur l'héritage de nos valeurs communes. Le désir naturel de tous les peuples d'instaurer la démocratie, la prospérité et la sécurité ne peut se réaliser à long terme que dans le rassemblement des forces de l'Europe tout entière. " Et puis cette autre : " Nous entendons mener une politique de coopération globale dans les domaines de la culture, de l'éducation, des sciences, des médias et des programmes d'échanges " C’est cette dernière phrase de 1991 qui nous a inspiré le thème de ce colloque au cours duquel seront abordés, comme dans un tour de force et comme les pierres d’une mosaïque, les sujets qui viennent d’être énumérés.
Pour ce qui est de la dimension politique du Triangle de Weimar, les trois ministres des Affaires étrangères ont décidé en 1991 de se rencontrer à l’avenir une fois par an et " de prévoir une réunion supplémentaire lorsque la situation en Europe le requiert. " Depuis, tous les ministres des Affaires étrangères – avec vos successeurs, cela en fait 15 au total pour les trois pays – ont satisfait à cette attente et se sont réunis au moins une fois par an. Et plus, ce qui n’était sans doute pas prévisible en 1991. Il y eut , en effet, une première rencontre en 1993 à Danzig des anciens présidents Lech Walesa, François Mitterrand et Richard von Weizsäcker et depuis 1998, sept années donc après la fondation du Triangle de Weimar, les chefs d’Etat français et polonais et le chancelier allemand se rencontrent tous les deux ans lors de qu’il est convenu d’appeler les " sommets de Weimar ". Ces sommets ont eu lieu jusqu’à maintenant deux fois en France, deux fois en Pologne et une fois en Allemagne. Pour ce qui est du 7ème sommet, la chancelière Angela Merkel avait invité les participants à se rendre à Weimar, dans cette salle même où nous sommes ? Ce sommet doit être rattrapé aussi rapidement que possible. 2
En plus des rencontres entre ministres des Affaires étrangères, des Chefs d’Etat et de gouvernement, le Triangle de Weimar a induit toute une série d’autres rencontres trilatérales au niveau ministériel, la quasi totalité des ressorts étant représentée. La dernière rencontre en date était celle des ministres de la Défense en juillet 2006 à Cracovie. A cela s’ajoutent les rencontres entre représentants des Régions – la prochaine est prévue au mois de septembre (2006) à Cracovie – et les jumelages entre villes. H. Schmalstieg, qui est aujourd’hui parmi nous, nous fera part, en tant que maire de Hanovre, de ses expériences et de celles de nombreuses autres villes. Landrat Friese parlera de la coopération entre les Régions, les collectivités régionales. Ce sont là des choses qui comptent en terme de proximité des citoyens. Il est, en effet, beaucoup plus difficile de mobiliser, au nom du Triangle de Weimar, la société civile, un concept souvent sollicité et pourtant difficile à définir. C’est pourquoi notre comité s’efforce de mettre en place, sous le patronage des trois fondateurs du Triangle de Weimar, une plate-forme permanente, ouverte à tous, qui lance des initiatives communes. Notre colloque est le signe tangible qu’il est possible de rassembler sur un même projet des représentants des sociétés civiles de nos trois pays.
Ce colloque pour le 15ème anniversaire du Triangle de Weimar n’aurait pu être réalisé sans les encouragements et le soutien du Président de la Bundeszentrale für politische Bildung, Thomas Krüger, sans l’engagement de l’OFAJ, représenté aujourd’hui par son Secrétaire général Max Claudet, ni sans celui du maire de Weimar, Stefan Wolf. Que tous en soient remerciés.
[…]
La première partie de notre rencontre, consacrée à la vision qu’avaient les pères fondateurs en 1991 et à ce qu’il en est advenu, quinze ans plus tard, en 2006, est introduite par Bronislaw Geremek, député au Parlement européen de Strasbourg, ancien ministre des Affaires étrangères de son pays, conseiller de Solidarno__, quelqu’un qui a toujours œuvré pour la coopération entre l’Allemagne, la France et la Pologne. Il a reçu le Prix Charlemagne de la ville d’Aix-la-Chapelle, est membre d’honneur de l’Association France-Pologne pour l’Europe à Paris et membre du Kuratorium du Comité pour la promotion de la coopération entre la France, la Pologne et l’Allemagne.


Bronislaw GEREMEK

Je me réjouis que les trois langues soient représentées lors de cette rencontre. Pour l’historien que je suis, il n’est pas fréquent de pouvoir parler d’un événement historique avec ceux qui en on été à l’origine, il y a quinze ans, pour en évoquer avec eux la genèse, l’évolution et les perspectives. Il y a quinze ans, nous vivions un moment particulier de l’histoire : l’unification de l’Allemagne et de l’Europe venait d’être réalisée, elle confrontait les hommes politiques en Europe à des défis particuliers. L’Allemagne et la Pologne étaient déjà d’accord sur la politique à suivre, le ministre polonais des Affaires étrangères, Krzystof Skubiszewskii parlait, d’une communauté d’intérêts germano-polonaise, avec en arrière-plan la longue histoire des relations germano-polonaises. La rencontre de Weimar fit apparaître, dans ce contexte, que pour construire la nouvelle Europe il fallait la rencontre de trois pays, il fallait que se rencontrent dans un même projet l’Allemagne, la France et la Pologne.
Trois questions se posent : Pourquoi le Triangle de Weimar ? Pourquoi la Pologne a-t-elle eu besoin de la France et de l’Allemagne ? Pourquoi l’Allemagne et la France ont-elle vu dans cette constellation une coopération pour l’avenir de l’Europe ? La première phrase de la déclaration commune de 1991 est particulièrement importante 3. Je souhaite donc entendre Hans-Dietrich Genscher expliquer ce qui a rassemblé les trois pays et pourquoi cela s’est produit à Weimar. Permettez moi de faire ressortir l’importance de son action alors que rien n’était encore décidé. H.-D. Genscher fait partie de ces Allemands qui ont compris, il y a de cela vingt-six ans, l’importance historique du mouvement Solidarno__ non seulement pour la Pologne, mais pour l’Europe. Il fait partie de ces grands Allemands qui appréhendent l’importance de la réconciliation entre le peuple polonais et le peuple allemand, des Polonais et des Allemands pour la construction de l’avenir de l’Europe. Je me rappelle de nombreuses rencontres avec H.-D. Genscher, je me rappelle en particulier la visite qu’il a faite à Varsovie, alors qu’il n’avait plus de fonctions officielles et qu’il était donc un simple citoyen. Il s’est rendu au parlement polonais, le Sejm, et pour la première fois dans son histoire, le Sejm s’est levé pour saluer un citoyen allemand en la personne de H.-D. Genscher, témoignant ainsi sa gratitude à un homme pour ce qu’il a fait pour l’Europe et pour la Pologne en tant qu’homme politique et homme d’Etat.
Lorsqu’a lieu la rencontre de Weimar, les problèmes européens de 1989 sont déjà derrière nous, les négociations 2+4 ont eu lieu, les positions polonaises sont connues. Derrière nous également les craintes provoquées en Pologne par le plan en dix points de Helmut Kohl. Mais déjà passé également le moment fort en charge symbolique où le chancelier Helmut Kohl et le premier Premier Ministre d’une Pologne indépendante, Tadeusz Mazowiecki, se sont donné l’accolade de la paix. Alors pourquoi cette rencontre de Weimar ?


Hans-Dietrich GENSCHER

C’est en effet un événement rare qu’il soit permis, dans un intervalle d’une décennie et demie, à trois personnalités qui ensemble ont voulu ouvrir une voie, de se retrouver, dans les lieux où tout a commencé, pour tirer un bilan. Nous le devons à l’engagement de la ville de Weimar, qui a donné son nom à notre coopération, et nous le devons également à l’engagement d’un Européen des plus dynamique, K.-H. Standke qui s’emploie si bien à maintenir vivants l’esprit et la philosophie du Triangle de Weimar.
Bronislaw Geremek vient d’éclairer fort justement l’arrière-plan historique de notre initiative. La partition de l’Europe et la partition de l’Allemagne appartenaient au passé. Il vient d’évoquer des événements et rencontres communes. Je voudrais en rappeler une à mon tour. Le matin du 10 novembre 1989, j’ai rencontré à Varsovie Lech Walesa et Bronislaw Geremek qui a dit : " La chute du Mur, cela signifie l’unité de l’Allemagne et c’est pour cela aussi un grand jour pour la Pologne, car, quand l’Allemagne sera unifiée, la Pologne sera le voisin de la Communauté européenne et le voisin de l’OTAN. " Une vision clairvoyante qui, le lendemain de la chute du Mur, nous a tous profondément touchés. C’était aussi l’ouverture d’une perspective à long terme, la preuve que les visions qui sont à la base du Triangle de Weimar peuvent devenir réalité. Alors, la France et l’Allemagne ont pris l’engagement, dans une déclaration commune, de soutenir le rapprochement des Etats en voie de réforme, situés à l’est de la ligne qui séparait avant l’Europe. Aujourd’hui, la Pologne et les autres Etats sont membres de l’Union européenne. Nous avons parcouru un long chemin même s’il reste encore beaucoup à faire. C’est la responsabilité commune des Français, des Polonais et des Allemands pour l’avenir de l’Europe qui est, au départ, la raison qui nous a conduits à nous mettre ensemble. Au début des années 30 du 19ème siècle, lors de la Fête de Hambach, un orateur allemand a déclaré : " La liberté de la Pologne est aussi la liberté de l’Allemagne ", tous étaient alors empreints de l’esprit de la Révolution française. C’est vrai que lorsque nos trois peuples agissent ensemble, c’est bien et important pour l’avenir de l’Europe.
En 1991, nous voulions exprimer l’idée que nos trois peuples ne sont pas seulement responsables du développement pacifique, amical et constructif de nos relations futures, mais que nos relations sont importantes pour unir l’Europe. L’unité de l’Europe n’est pas imaginable sans la coopération de nos trois pays. Nous devons en être intimement persuadés. Lorsque, il y aura bientôt soixante ans, Churchill a tenu son grand discours à Zurich 4, il a appelé les Français et les Allemands à mettre un terme à leur inimitié séculaire et à construire l’Europe. Nous avons, à l’époque, compris ce qui s’était passé. Après la Seconde Guerre mondiale, nous avons connu des révoltes dans tous les Etats de l’Empire soviétique, mais après 1989, ce que nous avons vécu, c’était autre chose, ce qui s’est passé en 1989, c’était une révolution européenne de la liberté. Et pour nous Allemands, il était important que des Allemands en aient été aussi et se soient battus pour la liberté en Europe. Solidarno__ en Pologne avait aplani la voie. La coopération entre les peuples d’Europe contribue à décider du progrès de l’unification européenne et du développement d’une nouvelle culture du vivre ensemble en Europe.
Le choix de Weimar devait exprimer l’idée que la nouvelle Europe est plus qu’une communauté économique, que ce qui nous unit, c’est une culture commune à laquelle tous les peuples d’Europe ont apporté une contribution essentielle. L’écrivaine allemande Christa Wolff a dit à l’époque : " On sait quand la guerre commence " pour enchaîner avec la question : " Mais quand commence l’avant-guerre ? " J’aimerais ajouter une autre question : " Où commence l’avant-guerre ? " Elle commence dans les cœurs des hommes, dans les têtes des hommes, là où les préjugés, l’arrogance, le mépris des autres empoisonnent les âmes des hommes. C’est pourquoi le sentiment d’appartenir à une culture commune, de vivre ensemble au sein d’une grande et commune culture européenne reste décisif pour les générations qui nous suivent. C’est pour cela que nous n’avons pas proposé Bonn ou Berlin, mais Weimar, cette ville, symbole de notre culture européenne que des représentants de nos trois pays n’ont cessé de porter haut. Je pense que cette journée doit être l’occasion pour ceux qui ont jeté les bases en son temps d’en appeler à nos peuples et aux gouvernements de nos pays de tout faire pour que nos trois Etats continuent au sein de l’Union européenne de progresser sur le chemin d’un avenir européen heureux.
Permettez-moi de faire une remarque à propos de l’allocution qu’a tenue hier Daniel Barenboim. Quand nous regardons vers le Proche-Orient, nous voyons une situation pour laquelle l’Europe peut servir d’exemple, d’exemple pour surmonter les oppositions et les inimitiés prétendument insurmontables. C’est cela aussi que symbolisent nos trois peuples. C’est pourquoi je demande à nos gouvernements et à nos peuples de continuer à donner vie au Triangle de Weimar pour leur avenir et celui de toute l’Europe.

Bronislaw GEREMEK

Je m’adresse maintenant au ministre Roland Dumas. Je souhaite insister sur les grands mérites qu’a eus la France dans les changements de la politique européenne après la Guerre froide sous la direction de François Mitterrand et de son proche collaborateur Roland Dumas. Pour la Pologne, il allait de soi que s’élève de France la voix de la liberté qui rappelle que la Pologne a sa place parmi les Etats européens démocratiques et indépendants. Cette voix, les Polonais l’attendaient. Pour la Pologne, la France est un voisin, avec lequel nous n’avons certes pas de frontière commune, mais que nous percevons avec toute la charge affective d’un voisin. Et comme il en va des émotions, ce n’est pas la raison, mais les sentiments qui priment. La participation de la Pologne aux plans français n’a pas toujours trouvé du côté français un écho amical et favorable. Je fais partie d’une génération pour laquelle Napoléon compte parmi les fondateurs de la liberté de l’Europe, mais je ne saurais dire pourquoi.
En 1989, ce n’était pas les rêves qui comptaient, il fallait compter avec la réalité. Quand en 1981 Lech Walesa était en visite à Paris, un mois avant la proclamation de l’état de guerre en Pologne, le chef du gouvernement français d’alors, Pierre Maurois, lui dit que la Pologne avait le droit de se libérer de l’influence de l’Union soviétique et que la France assumerait en pareil cas ses responsabilités. Au nom du Président Mitterrand, il ajouta : " Si Solidarno__ tient encore six mois .... " Nous n’avons pas pu tenir aussi longtemps. Un mois plus tard, l’armée envahissait les rues de Varsovie et d’autres villes, Solidarno__ fut défait. En décembre 1988, François Mitterrand invita Lech Walesa à Paris, ce qui était beaucoup plus qu’un geste officiel. Lech Walesa était à l’époque un citoyen privé de ses droits et dont les agissements étaient flétris devant l’opinion publique. L’invitation de Lech Walesa à Paris fin 1988 était l’annonce d’un processus pacifique de transformation en Pologne. Le gouvernement communiste polonais d’alors a compris la portée du geste et compris également que toute l’Europe regardait Solidarno__ et Lech Walesa. C’est l’une des raisons pour lesquelles le gouvernement communiste a alors cherché le dialogue.
Et puis vint l’année 1989, avec ses négociations sur l’avenir de l’Allemagne et la prise de conscience, en particulier en Pologne, que de l’unité allemande dépendait autant l’avenir de l’Europe que de la Pologne. C’est l’opposition qui disait en Pologne que la Pologne avait besoin de l’unification allemande. Comment, Monsieur le Ministre, la France a-t-elle perçu ce processus qui signifiait la fin de la Guerre froide ? Comment avez-vous à Weimar, dans cette ville où Hans-Dietrich Geber vous recevait, le rôle de cette forme particulière d’entente entre des pays poursuivant une même idée, mais aux potentiels si différents ? La Pologne était un pays pauvre avide de liberté, l’Allemagne et la France, deux grands pays dont la réconciliation avait jeté les fondements de l’unité de l’Europe. Dans quelle mesure a-t-on à l’époque perçu ce rapprochement entre partenaires inégaux comme une pièce dans la construction de la future Europe ?

Roland DUMAS

Ma première parole sera pour saluer et remercier M. le Maire de Weimar qui nous accueille avec autant de gentillesse et de fidélité à notre action. Je remercie aussi tous ceux autour de cette table et au-delà de cette table qui consacrent leur temps, bénévolement, au travail du Triangle de Weimar et qui permettent grâce à eux, j’en vois parmi vous des Français, des Polonais, des Allemands, c’est grâce à eux que nous survivons et que nous allons de réunion officielle en réunion officielle comme celle-ci. Sans eux, le Triangle de Weimar n’existerait pas ; donc je voudrais au nom de notre participation au Triangle de Weimar les remercier chaleureusement et maintenant en venir à la question qui m’est posée. M. Geremek, comme toujours, a bien dressé le tableau, il a préparé la réponse à sa question : comment est né le processus du côté français qui a conduit au Triangle de Weimar ? Il n’est pas né comme ça spontanément. Sans vouloir le taquiner, je dirais qu’il n’est pas né par l’opération du Saint-Esprit. Chacun a son histoire, ici en particulier dans cette assemblée, M. Genscher vient de résumer ce qu’il avait retenu, gardé, conservé de l’histoire de son pays. La Pologne nous allons en parler. La France c’est une longue histoire d’amour avec la Pologne qui ne date pas du Triangle de Weimar quel que soit le mérite que l’on veut reconnaître aux fondateurs de ce Triangle. C’est une affaire qui remonte loin dans le temps, au temps des Rois, des Royautés, des guerres, et pour ne prendre que la période qui nous concerne, je dirais que nous avions, moi et ma génération, nous avions un constant intérêt, une attention permanente pour ce qui se passait en Pologne : la Seconde Guerre mondiale qui est née là, ses déroulements qui atteignent chacun de nous dans nos familles. Personnellement j’étais très jeune mais j’ai gardé le souvenir de la déroute de 1940 et de l’époque où mon père qui commandait une escadre de l’aviation a accueilli à Lyon-Bron l’aviation polonaise qui s’était réfugiée chez nous pour se refaire, refaire ses pilotes, et repartir pour l’Angleterre poursuivre la lutte. Et nous avions déjà beaucoup d’admiration pour la place de la Pologne dans le combat de cette époque-là ! C’était très riche, très fort. Et puis après la guerre, nous savions quand même ce qui se passait en Pologne ; on avait une presse, des informations, des gens qui allaient, qui venaient, et lorsque la situation est devenue ce qu’elle était en 1981, le déchaînement en France était total. Pour répondre à la question : tout le monde était concerné par la Pologne. A commencer par les syndicats, les journaux, les hommes politiques, les organisations. Il y avait donc déjà en 1981 un sentiment fort pour ce qui se passait en Pologne. Et lorsque j’ai été appelé aux Affaires Etrangères par le Président François Mitterrand et que je rencontrais mon ami Hans-Dietrich Genscher, nous parlions évidemment des relations entre la France et l’Allemagne, ça allait de soi, mais la France et l’Allemagne avaient fait déjà un long chemin ensemble dans les années 80. Et plus encore lorsqu’en 1991 on imagina ce Triangle de Weimar. La France et l’Allemagne avaient fait cette longue route qui avait suivi la terrible Guerre mondiale, la Seconde Guerre mondiale avec tous ses cortèges de malheur, de deuils et de morts ! Nous étions déjà dans un autre climat, et cela faisait plus de quarante ans que cela durait. Nous avions fait des progrès et nous avions déjà plein de projets. Genscher et moi nous les partagions ; tantôt c’était un projet français qui devenait un projet franco-allemand, tantôt c’était un projet allemand qui devenait germano-français. Nous avions donc une autre situation dans le monde, par rapport à l’Europe et par rapport au monde. Mais la Pologne qui intéressait l’Allemagne pour les raisons qui viennent d’être dites et que je ne reprends pas, et qui était l’affection de la France, était restée, elle, en chemin. D’abord l’occupation, la guerre, l’occupation, le régime communiste, la dictature, etc. Donc il a fallu imaginer dans les années 89-90, surtout après la chute du mur, où il était clair que tout allait bouger, tout allait changer, et que nous devions, dans cette perspective, imaginer pour la France, pour l’Allemagne et pour la France à l’égard de la Pologne, quelque chose d’original. Et cette originalité elle est venue de notre réflexion de proposer à notre ami Skubiszewski quelque chose qui est un ovni, une sorte d’objet indéterminé, ce n’est pas un traité international, ce n’est pas une institution, ce n’est pas une organisation mondiale, c’est le Triangle de Weimar qui est désigné spécifiquement.
Alors pourquoi cette idée ? D’abord, plusieurs idées me sont venues à l’esprit. La Pologne et l’Allemagne avaient un contentieux plus direct qu’avec la France. Donc le souci des Allemands – et, par pudeur, je pense que Hans-Dietrich Genscher n’a pas voulu y faire allusion – il y avait une préoccupation à l’époque des autorités allemandes, et surtout de Hans-Dietrich, vis-à-vis de la Pologne. Comment aborder ce problème, cette nouvelle période des relations entre l’Allemagne et la Pologne ? Le problème, il n’était pas pour la France, il était pour l’Allemagne, et j’ai très bien compris à l’époque que, l’entente franco-allemande, cette perspective d’organisation de l’Europe autour de l’axe, comme on disait, franco-allemand, devait servir aussi à régler ce problème, à la fois psychologique, politique. Faire en sorte que l’Allemagne ne se retrouve pas, comme si rien ne s’était passé, en tête-à-tête avec la Pologne. Et que dans la perspective de l’Europe qui n’existait pas encore, et qui sera le creuset futur, du reste j’en dirai un mot tout à l’heure, dans lequel chacun devait trouver sa place, que l’entente franco-allemande devait servir à suggérer une solution nouvelle à nos relations à l’intérieur de l’Europe. Ça c’était la première idée.
La deuxième idée était de voir comment, ce qui s’était produit en Occident, et qui désormais se produisait dans l’Europe orientale, depuis la chute du mur de Berlin – la chute du mur de Berlin, ce n’était qu’un an et demi avant la création du Triangle de Weimar -, autour de cette perspective qui s’ouvrait, répondre aux préoccupations au-delà de la Pologne, au-delà de ce pays ami, répondre aux préoccupations de tous les pays de l’Europe de l’Est qui s’interrogeaient pour savoir comment les choses allaient s’organiser entre les deux parties de l’Europe. Au fond, les pays de l’Est qui sortaient de la dictature communiste avaient deux aspirations, disons-le, qui sont encore un peu aujourd’hui en filigrane : la recherche de la sécurité qu’ils avaient perdue pendant un demi-siècle, d’où le besoin d’aller vers l’Alliance atlantique, c’est-à-dire là où était la force qui avait sauvé la liberté de l’Occident, et deuxièmement, pour des pays qui avaient été diminués par le régime communiste imposé par l’Union soviétique, avec la complicité d’un certain nombre de personnalités, ce régime qui avait amenuisé l’économie de ces pays, faisait que ces pays aspiraient à plus de prospérité. D’où, l’envie d’entrer dans la Communauté européenne, de participer à la construction de l’Europe. Et donc dans cette double préoccupation que nous comprenions très bien, il fallait offrir un endroit, une cellule, une organisation, même informelle, où l’on pouvait à la fois traiter des problèmes passés - des problèmes passés qui avaient laissé leurs traces, qui apparaissent encore souvent aujourd’hui dans les discussions, je ne fais pas allusion au contemporain, à l’actualité, il y a beaucoup de sujets qui resurgissent et qu’il faut traiter -, donc avoir un endroit, où l’on pourrait à la fois, France et Allemagne, accompagner la Pologne, la Pologne accompagner la France et l’Allemagne dans cette perspective, réfléchir aux sujets anciens, et préparer les solutions aux problèmes de l’avenir. C’était ça le début du Triangle de Weimar, et je crois que les quinze années qui se sont écoulées ont montré son utilité. En effet, on ne voit pas la reprise d’un dialogue en tête-à-tête avec les contentieux qu’on s’envoie à la tête, face à face c’est toujours désagréable, ça n’a pas donné de bons résultats dans le passé. A trois, c’est peut-être plus acceptable, c’est-à-dire on a plus d’urbanité [sic ?], on a plus de sagesse, le troisième peut intervenir dans le débat, donc à trois, le Triangle c’est déjà utile pour ça.
C’était également utile pour faire que la Pologne prenne sa part maintenant, reprenne sa place dans l’Europe d’aujourd’hui et dans celle de demain, dans tous les domaines où elle a excellé, que ce soit les arts, la culture, la recherche, les sciences, et qu’elle participe à la vie de l’Europe naissante. Donc la question qui va se poser, qui a été posée, et à laquelle je réponds par avance, non seulement le Triangle de Weimar a répondu aux préoccupations qui étaient les nôtres il y a quinze ans, mais il demeure aujourd’hui en place de telle façon qu’il va jouer un rôle différent mais aussi important que dans la première période. C’est pourquoi, je répondrais à la question de notre ami Geremek : moi je suis pour le maintien, pour le renforcement, pour l’amélioration du fonctionnement du Triangle de Weimar parce que la période que nous avons connue est une période utile et celle qui va venir, le sera plus encore. […]
&Mac183; Je crois que le Triangle de Weimar ne peut pas se substituer à autre chose. Il est ce qu’il est. Avec ses moyens, son originalité et ses insuffisances. Il y a toutes les institutions étatiques, para-étatiques, qui ont des moyens financiers beaucoup plus importants et qui gèrent les affaires publiques.
&Mac183; Donc à partir de là, deuxième idée, le Triangle de Weimar est fait pour corriger les orientations qui ne sont pas satisfaisantes, et suggérer, donner des idées, parce qu’après tout, personne n’a le monopole des idées,
&Mac183; troisième et dernière remarque : le Triangle de Weimar doit vivre de lui-même. Et quand on dit : il faut faire appel, envoyer un message à la jeunesse, je pense que la jeunesse elle-même est en train de concevoir, j’ai eu quelques exemples ces derniers jours, de bien concevoir l’intérêt de l’Europe et à l’intérieur de l’Europe, de ce que nous avons fait et créé avec le Triangle de Weimar. J’ai appris d’ailleurs avec beaucoup de satisfaction que certaines de nos facultés, en France, en Allemagne, peut-être en Pologne ça je ne sais pas, donnaient maintenant comme thème d’études des recherches pour le doctorat ou la thèse " le Triangle de Weimar " et plus particulièrement – je crois même qu’il y a quelqu’un qui est assis autour de cette table qui pourra le confirmer – le sujet de l’art ou de la culture dans le Triangle de Weimar. Ça c’est évident que c’est un des grands sujets sur lequel il y a tellement à faire que l’Union Européenne, le Parlement s’y intéressent, mais qu’il serait bon que le Triangle de Weimar qui veut innover relance tout ça. Je constate avec grande joie que l’université prend cette affaire en main et que les étudiants s’y intéressent. En France, je crois que M. Ménudier qui aura la parole dans un instant pourra le confirmer, et je sais que l’Université de Sarrebruck et d’autres proposent des sujets d’actualité ou même d’avenir. La recherche, la culture sont des sujets qui restent devant nous et qui sont à défricher. Voilà, il faut que nous incitions, il faut que tout le monde s’y mette, que les enseignants, les universités le fassent, mais aussi que les étudiants commencent à s’intéresser à ces thèmes-là.

Bronislaw GEREMEK

Quand le Professeur Krzysztof Skubiszewski est devenu le chef de la diplomatie polonaise, il avait l’expérience de la génération de la guerre et la conscience que beaucoup de choses séparent l’Allemagne et la Pologne, les peuples allemand et polonais. Qu’un homme de sa génération s’employât à réaliser la réconciliation germano-polonaise dans le domaine politique, est donc d’une importance particulière. K. Skubiszewski est, jusqu’à aujourd’hui encore, l’architecte de la politique étrangère polonaise. Les objectifs qu’il lui a assignés ont été atteints, les méthodes qu’il a définies pour mener l’action de la Pologne continuent d’être valables. Quand en 1991 la Pologne eut besoin d’aide, ce fut pour mettre en pratique une politique qui visait l’adhésion de la Pologne à ce qu’il appelait les structures européennes et euro-atlantiques, l’adhésion donc à la Communauté européenne et à l’OTAN. A cet effet, la Pologne comptait sur la compréhension de l’Europe et du monde, mais surtout sur celle des deux Etats et peuples qui avaient réussi à construire l’Europe sur les ruines de la Seconde Guerre mondiale, la France et l’Allemagne. Le Triangle de Weimar a vu le jour avant que l’on parle, dans les relations germano-polonaises, de processus de réconciliation entre les peuples. La politique étrangère polonaise se heurta, dans son désir d’intégrer les structures occidentales sur la base d’une communauté de valeurs, à un obstacle qui était mental et culturel dans les mémoires allemandes et polonaises. Elle était un élément dans l’émergence d’une nouvelle politique européenne. Ma question est donc de savoir quelle perception vous aviez, au moment de vous rencontrer à trois à Weimar, chacun représentant les intérêts de son pays mais tous étant liés par une même communauté de valeurs, des possibilités de vous entendre à trois au profit de l’Europe.

Krzysztof SKUBISZEWSKI

Cette rencontre éveille en moi divers souvenirs et provoque différentes réflexions. C’est pour moi un moment agréable. Peut-être vais-je dire d’abord quelques mots en allemand puisque nous sommes dans une ville allemande, dans une ville où vécut et oeuvra si longtemps Johann Wolfgang Goethe, ce maître de la langue allemande. Mon exposé sera bref pour ne pas démentir Goethe qui disait que l’art est de savoir se limiter (In der Begrenzung liegt der Meister).

Reconnaître les intérêts communs que nous avions ouvrait de nouvelles possibilités dès après l’année 1989, c’est-à-dire après le ‘tournant’ en Allemagne, pour une politique active de voisinage de nos trois peuples. L’idée d’une coopération trilatérale, ce sera l’objet de ma contribution d’aujourd’hui à l’histoire du Triangle de Weimar, a été mise en œuvre par Hans-Dietrich genscher. C’était tout à fait nouveau, comme je me plais à le faire remarquer, non seulement dans l’histoire, mais aussi dans le cadre de la diplomatie européenne d’aujourd’hui. C’était une chance de pouvoir agir dans un espace européen marqué par les pires conflits et de contribuer à l’émergence d’un sentiment d’appartenance commune. Peut-être y-a-t-il dans cette formule un élément de réponse à la question posée par Monsieur le Professeur Geremek. Dans ses Mémoires (Erinnerungen), Hans-Dietrich Genscher écrit, je le cite, que " Bonn et Paris prenaient au sérieux l’idée de développer une relation importante avec la Pologne . La France, la Pologne et l’Allemagne ayant une responsabilité commune pour l’unité de l’Europe. " L’arc de Weimar que forment la France, l’Allemagne et la Pologne devait ouvrir une nouvelle perspective européenne.
Dans ses mémoires, l’ancien ministre des Affaires étrangères Roland Dumas évoque en mars 1991 la rencontre des ambassadeurs français et allemands en Europe centrale à l’occasion de laquelle il fut également question d’une politique à l’Est commune. Roland Dumas mentionne la dissolution du Pacte de Varsovie et insiste sur la dynamique de la paix. C’est la situation nouvellement créée en Europe qui a conduit Dumas et Genscher à se tourner vers la Pologne. Dumas situe cette initiative dans le contexte de craintes polonaises face au risque d’hégémonie d’une grande puissance et à un nouveau Yalta. Quand Hans-Dietrich Genscher, à l’occasion d’une rencontre, m’expliqua son idée, ma réaction ne fut pas seulement favorable, elle fut enthousiaste. Car il était clair pour moi que la conception d’une relation trilatérale ne pouvait avoir que des retombées positives pour la Pologne et l’Europe. Je vis immédiatement l’énorme potentiel que le Triangle de Weimar pouvait jouer en faveur de notre quête de sécurité. L’intégration de la Pologne dans le domaine exemplaire de la coopération franco-allemande était à l’époque et est encore aujourd’hui un facteur essentiel de stabilité pour nous. Il était évident que l’arc de Weimar ne pouvait qu’ouvrir des perspectives favorables à notre future entrée dans les organisations occidentales.

Si vous permettez, je dirai maintenant quelques mots en français. Une autre langue de notre Triangle. Quel est l’avenir de notre organisme informel ? Il me semble que l’élargissement de la communauté de l’Union européenne vers l’Est, contenant la Pologne, ça crée des bases nouvelles pour notre coopération, des bases plus larges. Il y a eu des commentateurs qui disaient, voilà plus ou moins la fin du Triangle de Weimar, la Pologne se trouve maintenant dans l’Union européenne, le but a été achevé. On est très loin de cela. Nous avons des tâches beaucoup plus larges, plus grandes, je dirais des tâches permanentes. Et voilà un phénomène négatif : il y a juste au moment de l’entrée polonaise à l’Union européenne, il y a un déficit de coopération. Ce dont nous avons besoin c’est d’une tâche, je dirais, grande : la coopération des trois gouvernements en ce qui concerne le futur traité européen de constitution. Pour l’instant en Pologne, il y a très peu de débats à propos de cette question mais ça changera sans doute. Il y a le problème des rapports et de la coopération entre l’Union européenne et l’Est européen, notamment avec la Russie, c’est un autre sujet pour le travail au sein du Triangle de Weimar. Il y a d’autres problèmes de la politique commune, des débuts de la politique commune au sein de l’Union européenne. Voilà un autre point du jour pour les trois pays. La liste peut être allongée et vraiment plus riche. Un autre point ce sont les rapports transatlantiques. On a évoqué le terme de " Interessengemeinschaft ", une communauté d’intérêts entre l’Allemagne et la Pologne après les changements de 1989. Il me semble qu’une telle communauté existe entre les trois pays et qu’il faut développer cette communauté. 5

En guise de conclusion, je souhaiterais dire que le principal intérêt du Triangle de Weimar, surtout au moment de sa création, a été de supprimer de grandes difficultés et certaines hostilités qui subsistaient encore. Les relations germano-polonaises étaient à cette époque bonnes et c’était tout le mérite du Ministre Genscher. Il en allait autrement de la France avec laquelle nous n’avions pas de ces problèmes, comme l’a rappelé le Ministre Dumas. Nous avons pu observer qu’une bonne coopération est possible, doit être possible même quand l’histoire s’est déroulé négativement, ce qui n’est pas arrivé rarement. Cela me conduit à faire une deuxième observation à propos de la déclaration de Weimar. Ces derniers temps, surtout dans les relations germano-polonaises, des débats historiques ont pris beaucoup de place au point de s’insinuer dans les relations entre les gouvernements et les Etats. Personne ne peut affirmer que l’histoire n’est pas une partie de la réalité politique. Pourtant je suis d’avis qu’il convient de faire la part entre débat historique et conception de la politique, en particulier de la politique étrangère. Cela ne signifie pas que nous ne devions pas cultiver la mémoire de l’histoire ou qu’il faille minimiser l’importance des symboles historiques. La politique doit avoir cela présent à l’esprit. Et pourtant une politique qui dépendrait de l’histoire peut aisément engendrer des tensions selon les positions adoptées ou même provoquer des complications en politique étrangère. Il convient de l’éviter. Que l’histoire ait ses limites, nous le savons depuis longtemps. Je pense ici à l’année 1965, au mémoire de l’Eglise protestante en Allemagne et à la lettre pastorale des Evêques polonais et allemands 6. Un troisième et dernier point. Je suis persuadé que la pérennisation du Triangle de Weimar et son bon fonctionnement renforce notre croyance en l’Europe. La coopération franco-germano-polonaise renforce notre croyance en l’Europe.

Bronislaw Geremek clôture le débat en reprenant ce message d’avenir des trois fondateurs du Triangle de Weimar: " Le Triangle de Weimar sert l’avenir de l’Europe. "
(Traduction de l’allemand en français : J. Vaillant)

1 Consultable dans sa version française sur le site du ministère polonais des Affaires étrangères :
http://msz.gov.pl. NdlR.

2 Ce 7ème sommet a eu lieu entre-temps le 5 décembre 2006 à Mettlach en Sarre, réunissant autour de la chancelière Angela Merkel les présidents Jacques Chirac et Lech Kaczynski. NdlR.

3 " La responsabilité de la France, de la Pologne et de l'Allemagne dans l'avenir de l'Europe. "

4 Discours du 19 septembre 1946 de W. Churchill à Zurich sur l’Europe. NdlR.

5 Tout ce paragraphe a été prononcé en français par K. Skubiszewski qui s’est auparavant exprimé en allemand. NdlR

6 Premier pas sur la voie de la réconciliation germano-polonaise, le mémoire de l’EKD sur " la situation des expulsés et la relation du peuple allemand à ses voisins de l’Est " (abrégé ‘Ostdenkschrift’, consultable sur le site de l’EKD : www.ekd.de), a été publié le 1er octobre 1965. Il provoqua un débat qui prépara l’ouverture à l’Est du gouvernement Brandt-Scheel à compter d’octobre 1969. Autre main tendue, en novembre 1965, les évêques catholiques polonais adressent à leurs homologues allemands une lettre pastorale commençant par la phrase : " Nous pardonnons et demandons pardon ". Dans leurs réponses, les évêques allemands déçurent par un excès d’égards pour le point de vue des réfugiés allemands. NdlR.


60 ans de Kaliningrad : que reste-t-il de la Prusse orientale ?

Résumé
Après la dissolution de l'Union soviétique en 1991 est apparu sur nos cartes européennes un petit territoire russe enclavé entre la Lituanie nouvellement indépendante et la Pologne : la région de Kaliningrad. Jusqu’en 1945, cette région était la partie Nord de la Prusse-Orientale allemande, annexée au lendemain de la Seconde guerre mondiale par Staline. Or 700 ans de souveraineté et d’histoire allemande ont laissé des traces, qui engendrent aujourd’hui des dynamiques internes et externes, qui jouent souvent un rôle primordial aussi bien dans les décisions de la Russie concernant ce territoire et que dans les relations que l’Allemagne entretient avec cette région particulière ; et ce, avec plus d’acuité depuis que Kaliningrad est devenue une enclave au sein de l’Union européenne élargie.

Zusammenfassung :
Nach der Auflösung der UdSSR Ende 1991 ist auf den europäischen Karten zwischen dem neu unabhängigen Litauen und Polen ein noch unter der russischen Souveränität verbliebenes Territorium erschienen: das Kaliningrader Gebiet. Bis 1945 war dieses Gebiet der nördliche Teil Ostpreußen, das nach dem zweiten Weltkrieg von der UdSSR annektiert wurde. Jedoch haben 700 Jahre deutscher Geschichte in diesem Gebiet Spuren hinterlassen, die heute interne sowie externe Dynamiken mit sich bringen, die meist in den russischen Entscheidungsprozessen und in den Beziehungen Deutschlands zu diesem besonderen Territorium eine hervorragende Rolle spielen, umso mehr, dass dieses Gebiet heute eine Enklave mitten in der EU bildet.

Abstract:
After the breaking up of the Soviet Union at the end of the year 1991, a small territory still under Russian sovereignty but cut off from the rest of the Russian Federation appeared on the European maps, tucked between the newly independent Lithuania and Poland: the region of Kaliningrad. This Russian region of Kaliningrad used to be the Northern part of East Prussia till 1945, when it was annexed by the Soviet Union. Yet, 700 years of German history left material marks in this territory, which today arise internal and external dynamics that have often played an important role in Russia’s political decision-making processes and in Germany’s relationship towards this peculiar territory, especially since Kaliningrad became an enclave within the enlarged EU.


Comptes rendus

J.P. Gougeon, Allemagne : une puissance en mutation (compterendu de J. Vaillant)
F. Bozo, Mitterand, la fin de la guerrefroide et l'unification allemande. De Yalta à Maastricht (compterendu de H. Miard-Delacroix)
G. Freissinier, La chute dumur à la télévision française (compte rendu de J.M. Lagarde)
F. Bafoil, Europe centrale et orientale. Mondialisation, européanisationet changement social (compte rendu de J. Vaillant)
B. Durand, S. Neubert, D. Röseberg, V. Viallon, Studieren inFrankreich und Deutschland. Akademische Lehr- und Lernkulturenim Vergleich (compte rendu de A.M. Pailhes) –D. Goeldel, Le tournant occidental de l’Allemagne après 1945.Contribution à l’histoire politique et culturelle de la RFA(compte rendu de J. Vaillant)
C. Burrichter, D. Nakath, G.R.Stephan, Deutsche Zeitgeschichte von 1945 bis 2000 Gesellschatf- Staat - Politik(compte rendu de A.M. Pailhes)
M. Horsinga-Renno, Cher oncle Georg. La bouleversante enquête d’unefemme sur un médecin de la mort impuni
V. Koop, Besetzt.Französische Besatzungspolitik in Deutschland (comptes rendusde J. Vaillant)
J. Mûller-Hohagen, Verleugnet verdrängt verschwiegen. Seelische Nachwirkungen der NS-Zeit und Wege zu ihrerÜberwindung (compte rendu de A.M. Pailhes)
J. Doll (sousla direction de J. Améry 1912-1978) De l’expérience descamps à l’écriture engagée (compte rendu de F. Knopper) –A.M. Lauter, Sicherheit und Reparationen. Die französischeÖffentlichkeit, der Rhein und die Ruhr (1919-1923) (compterendu de L. Charrier)
M. Schubert, W. Bernschein, Potsdam-Babelsberg, der spezielle Reiseführer (compte rendude L. Thaisy)


Une pensée en exil T.W. Adorno et le projet de Current of Music

L'exil américain du philosophe T. W. Adorno constitua le cadre d’un cas singulier de confrontation entre deux traditions de pensée hétérogènes. Connu pour ses travaux spéculatifs sur la musique, le penseur allemand se vit en effet confronté à la naissance des nouveaux médias de masse et de la culture populaire. Quittant l’Allemagne en 1934, il s’installa aux Etats-Unis, à New York, au début des années 1940 et eut ainsi l’occasion de rejoindre à Princeton l’étude de sociologie des médias de P. L. Lazarsfeld, portant sur la réception de la radio. Si ce travail commun prit fin dans une incompréhension réciproque, il représente néanmoins une tentative particulièrement intéressante d’union des grands thèmes de la Théorie Critique de l’Ecole de Francfort et des démarches méthodologiques d’une sociologie américaine plus empirique.

The american exile of the great philosopher T. W. Adorno has been the setting of an interesting case of confrontation between two different intellectual traditions. Well-known for his speculative works about music, the german thinker had to consider the rise of mass-media and popullar culture. Leaving Germany in 1934, he moved in the Unites States, in New York, in the early 1940’ and could then join in Princeton the sociological team of P. L. Lazarsfeld, which worked on broadcast reception. Altough this collaboration ended with a mutual incomprehension, it gives and idea of what could have been the union of the main issues of the Franfurter School’s Critical Theory and the methods of a more empirical américan sociology.

Das amerikanische Exil T. W. Adorno wurde der Rahmen einer Auseinandersetzung zwischen zwei unterschiedenen Kulturen. Bekannt als spekulativer Musikkritiker, der deutsche Philosoph musste die Entstehung der neuen Massenmedien und der Populär-Kultur berücksichtigen. Er fahrt aus Deutschland im 1934 und zieht in Amerika, in New York ein. Da kann er sich mit der soziologischen Forschungsgruppe von P. L. Lazarsfeld verbinden, die Rundfunkrezeption studierte. Obwohl diese Zusammenarbeit endete im gegenseitigen Unverständnis, bildet sie die Möglichkeit einer Vereinigung zwischen den Hauptthemen der Kritische Theorie der Frankfurter Schule und den methodologischen Verfahren einer empiristischen amerikanischen Soziologie.


Carnet littéraire

Le vieil homme et ses frasques : les deux derniers romans de Martin Walser

Il rebute ou fascine. On peut voir en lui un styliste audacieux, grisant, parfois négligent, un polémiste brillant qui va au devant du scandale, un bavard impénitent qui se gargarise de mots. On peut retenir de son œuvre protéiforme la critique acerbe de la République fédérale de ses premiers romans, Ehen in Philippsburg (1957) et Halbzeit (1960), apprécier l'engagement militant des années 70, s’indigner de ses prises de position récentes au sujet de la culpabilité allemande, contester le personnage ombrageux - on se rappelle la mise à mort de Marcel Reich-Ranicki dans Tod eines Kritikers (2002) qui lui valut d’être taxé d’antisémitisme (cf. aussi AA, No 178, l’article de N. Colin) -, critiquer sa soif de reconnaissance, son égocentrisme, son érotomanie comme l’ont dit certains ou plutôt certaines. A près de 80 ans, Martin Walser est incontestablement l’un des grands noms de la littérature allemande contemporaine. Inlassablement productif et toujours provocant, comme l’attestent ses deux derniers romans, Der Augenblick der Liebe, paru en 2004, et Angstblüte, sorti au cours de l’été 2006. Deux livres qui parlent de l’amour, du sexe, du vieillissement et de l’appétit de vivre.

Il y a des instants qui foudroient. Gottlieb Zürn, (les lecteurs de Walser l’ont déjà rencontré dans Im Schwanenhaus (1980) et Jagd (1988), marié, la soixantaine bien entamée, s’est retiré des affaires en confiant à sa femme Anna la gestion de son agence immobilière. Lui-même s’occupe en dilettante de philosophie. Un jour, il reçoit dans sa villa du lac de Constance la visite de Beate, étudiante chercheuse en philosophie dans une université américaine. Une visite à des fins scientifiques car Beate s’est entichée d’un philosophe français du dix-huitième siècle, Julien Offray de La Mettrie, penseur matérialiste et athée, sur lequel Gottlieb a publié dans un passé lointain deux malheureux articles. Lui-même pourrait être le grand-père de Beate, et pourtant cette jeune personne à la vitalité impudente, à la bouche goulue " comme celle du nourrisson qui vient de quitter le sein de sa mère ", instaure d’emblée avec lui un dialogue lourd de tension érotique: " il n’y a rien qui ne puisse être puni ", lance -t’elle à son interlocuteur, qui lui rétorque: " oui, mais l’air résonne de possibilités ". L’énorme fleur de tournesol offerte par Beate, tellement envahissante qu’il a fallu la placer sur la terrasse de la villa, signale de manière cocasse le caractère incongru de la situation. Après le départ de Beate, Anna, qui a assisté sans mot dire à la scène, se contente de la commenter en épouse blasée: " Inutile de t’en faire. Quarante ans vous séparent. Là, vraiment, tu peux laisser tomber ", dit-elle à son époux. La voix de la sagesse.

Mais Gottlieb est tout sauf sage. Avec sa tenue affriolante, son regard " massivement bleu " et ses allures provocantes, Beate le confronte brutalement à la léthargie dans laquelle il s’est enlisé. Le désir s’empare de lui avec une force élémentaire. Lui-même voit dans la différence d’âge l’occasion d’un défi qui l’électrise. Exit l’épouse encombrante, Gottlieb va jusqu’à jouer avec l’idée qu’elle pourrait frôler la noyade lors d’une de ces parties de voile que le couple affectionne. Plus rien n’existe que cette fille qui a fait irruption dans sa vie avec cette étrange fleur de tournesol, ce " cœur sombre entouré de flammes jaunes ", figure de la vie et de ses mystères insondables.

Après une série d’échanges épistolaires et de conversations téléphoniques où Beate et Gottlieb stimulent à grands frais leur désir réciproque, Gottlieb arrive en Californie, où il est invité à participer à un colloque sur La Mettrie. Décidé à " se laisser doucement aller aux agréables impulsions de la nature ", comme le recommande non plus La Mettrie, mais Rousseau dont il a fait sa lecture de voyage. Puis vient la minute de vérité. La rencontre tellement attendue jette une lumière cruelle et comique sur son incapacité, alors qu’il s’est soigneusement préparé mentalement et physiquement, à réagir de manière adéquate aux comportements relâchés et aux attentes précises de son impétueuse partenaire. Une autre blessure l’attend lorsque le fameux colloque tourne au fiasco. Victime d’une soudaine extinction de voix, il doit assister à la lecture de son texte par Beate qui le remplace au pied levé et recueille les applaudissements fournis du public. Après quoi, il est violemment pris à parti par le professeur américain organisateur du colloque pour avoir soi-disant tenté, lui intellectuel allemand, de laver le peuple allemand de toute culpabilité en s’abritant derrière La Mettrie (allusion transparente au scandale provoqué par le discours de Walser à Francfort en 1998). Un beau jour, Gottlieb se réveille - réplique piquante du moment-choc où Beate l’avait fait sortir de " l’anesthésie " de la vie conjugale - et découvre avec des yeux étonnés, lui, Gottlieb Zürn, bourgeois aisé, la chambre d’étudiante sommairement meublée de Beate, où la différence d’âge se fait de plus en plus sensible et où la cohabitation frôle le grotesque. Anna, sortie du placard où son aimable époux l’avait remisée, se voit soudain parée de toutes les vertus; face aux séquelles de son extinction de voix, Gottlieb repense avec émotion à ses dons de naturopathe… Il plante là la gamine et court, ou plutôt il vole retrouver sa compagne de toujours.

Ultime revirement dans ce va-et-vient pathétique et douteux: après quelques semaines de retrouvailles conjugales, Gottlieb a des remords. Conscient d’être " passé à côté de la vie " et de cette fille " démesurée ", il cherche, en vain, à renouer avec Beate qui a entre-temps épousé l’universitaire teigneux. Une nouvelle pulsion de vie qu’il explique ainsi: " Moins la vie te va bien, et plus tu t’en empares avec violence. C’est la loi. La loi de la vie ". On pourra ne pas trop s’attarder sur les citations philosophiques fastidieuses dont Walser a truffé son livre pour étayer sa philosophie de l’instant, mais il parle bien, avec intelligence, humour et distance, de la vieillesse, de ses bouleversements psychiques et de l’urgence de vivre qui lui est associée.

Angstblüte, au regard duquel Der Augenblick der Liebe fait figure de modeste galop d’essai, traite le même sujet de façon plus sulfureuse encore tout en l’insérant dans un cadre plus ample. Martin Walser déploie ici toutes les facettes de son immense talent. Le protagoniste Karl von Kahn, marié, septuagénaire, ancien employé de banque, a monté sa propre affaire. Conseiller en placements boursiers auprès de personnes âgées et fortunées, il jongle avec son argent et celui des autres pour le faire fructifier. Sa capacité d’entrer en résonance avec les moindres fluctuations du marché, ses dons de psychologue et sa passion du risque en ont fait un virtuose de la spéculation. Spéculer, ou plutôt " parier ", comme le disent les Anglais en usant d’un terme plus sportif. Une activité qu’il pratique avec enthousiasme et dont il parle en termes poétiques, lyriques, quasi-mystiques : " Le marché est un système nerveux ", explique-t-il à ses clients, les dépôts qu’il lui ont confiés font partie de son propre système nerveux, à charge pour lui de prévenir les catastrophes en les déplaçant intuitivement là où il faut: " Karl avait le sentiment que lorsque le danger était proche, il ne pouvait plus faire d’erreur. Il avait peut-être un instinct animal. Monter toujours plus haut et accélérer, c’était là la formule de son énergie. Parfois, il avait presque l’impression de planer ". La spéculation ou la vie, le risque à l’état pur. Investir pour se sentir vivre pleinement. Poussé par une force intérieure qui le pousse en avant, Karl obéit à cet instinct jusqu’à connaître cette griserie qui potentialise la vie. Le livre renferme quantité de pages inspirées sur cette passion du risque, de la spéculation vécue comme une drogue, et sur l’audace qui n’est rien d’autre, reconnaît Karl, que la face cachée de la peur : "Tu suis ton instinct, un instinct aiguisé par l’expérience. Chaque danger fait jaillir de toi un comportement à suivre. La peur ne te paralyse pas. Tu as peur. Bien sûr, tu as peur. Tu as toujours eu peur. La peur aiguise tes sensations. La peur, telle une fleur, s’épanouit en toi, elle dégage un parfum, un parfum que tu respires comme une drogue ".

L’action se passe de nos jours dans la société huppée de Munich et s’organise autour de personnalités people qui partagent la même passion du risque, du succès et de l’argent. Diego, amateur de sentences et lié à Karl par une étroite amitié, a fait sien le mot d’esprit de Voltaire: " le superflu, chose très nécessaire ". Marchand de tableaux et d’antiquités à la réputation internationale, il court le monde à la recherche de chefs-d’œuvre convoités, pour les besoins de sa clientèle et aussi pour lui-même, afin de meubler la petite folie wagnérienne qu’il a acquise sur les berges de l’Isar et dont il est si fier. S’enrichir, tel est le credo des deux hommes pour qui l’argent est un moyen de satisfaire une passion, la spéculation envisagée comme un sport de haut niveau pour l’un, l’amour des belles choses pour l’autre et le besoin de les posséder. La (seconde) femme de Diego, la célèbre Gundi, bat des records d’audience hebdomadaires sur le petit écran avec son émission live " Zu Gast bei Gundi ", un show sophistiqué dont elle fait à chaque fois un événement. Une performance de funambule, un échange audacieux de questions/réponses destiné à cerner la personnalité d’un invité qui accepte de se prêter au jeu. Plus discrète que Gundi, Helen, la femme de Karl, dirige un cabinet de thérapie de couple, un métier qu’elle exerce avec passion, une passion encore accrue lorsque ses chances de succès semblent minces. Karl et Helen ont fait connaissance lors d’une partie de tennis. Lorsqu’ils se sont mariés (un second mariage là aussi), Karl est venu vivre chez Helen où il a réussi à conquérir un espace pour lui seul, une pièce située sous les combles qui lui sert de bureau et où, lorsque le besoin s’en fait sentir, il se met à distance de la vie conjugale. Helen est une femme sensible, intelligente, affectueuse, attentionnée. Tous deux vivent en bonne harmonie, y compris sur le plan sexuel, leurs métiers sont complémentaires.

Pour le septuagénaire Karl von Kahn pourtant, la chasse au bonheur ne connaît pas de limites. Lorsqu’il rencontre Joni Jetter, la trentaine, une obscure starlette engagée par un certain Theo Strabanzer, producteur miteux devenu son amant, pour tourner dans un film qui promet d’être un navet, ses sens sont bouleversés. Du déjà vu. Des mèches blondissimes savamment ébouriffées - Karl entrevoit de manière fugace l’image d’Helen toujours sagement coiffée -, un léger morceau d’étoffe diaphane négligemment noué autour des hanches, et surtout des seins offerts, triomphants, à portée de main. Lors du repas qui les réunit tous les trois au restaurant de l’hôtel Kronprinz, tenu par l’un des clients de Karl et bien côté dans le Gault et Millaut, Joni jette de manière on ne peut plus explicite son dévolu sur Karl, en présence du producteur imbibé. Le lendemain matin, le téléphone sonne: " J’ai envie de te lécher les couilles " s’entend dire Karl qui garde son sang-froid. Il s’agit d’assurer. S’engage alors un échange verbal, un match de ping-pong où chaque partenaire rivalise d’audace. L’affaire est conclue. Joni, impérieuse, fixe le rendez-vous le soir même à l’hôtel Kronprinz. Karl dispose là d’une suite somptueuse qui lui permet de s’offrir de temps en temps et en toute discrétion des plaisirs extra- conjugaux. Karl est subjugué, un peu inquiet quand même en pensant à l’attaque de l’échange téléphonique: " Allait-il pouvoir encore apprendre ce langage ? Une langue étrangère sans aucun doute, belle comme toutes les langues étrangères ". Eh bien, oui, Karl apprend hardiment la langue en question. Bien décidé à posséder cette créature de rêve aussi tentante qu’un fruit mûr. A mesure qu’il avance en âge, Karl von Kahn revendique toujours plus âprement sa liberté et le droit d’ignorer la morale. "Il ne voulait plus rien se reprocher, ni ce qu’il faisait, ni ce qu’il ne faisait pas Il voulait enfin être tel qu’il était et non tel qu’il devait être. Pour ce qui est de l’appétit sexuel, c’est de toutes façons vrai, il s’exerce tout simplement, la mort, l’amitié, les tragédies, tout cela ne compte pas ". Une force qui réclame son dû, envers et contre tout.

Le soir venu, Karl, arrivé en métro, voit débouler Joni dans un mini-cabriolet BMW rouge pétant, détail prévisible auquel lui, l’homme des prévisions, n’a pourtant pas pensé. Tous deux prennent possession de la suite du Kronprinz mise à leur disposition et se retrouvent rapidement en tenue légère (Karl a pris soin de s’enfiler sous les draps sans être vu). On fait d’abord connaissance, chacun se présente. Joni, très " nature ", raconte comment elle a quitté la Ruhr où elle est née pour atterrir à Munich en espérant bien faire carrière dans le cinéma. L’imprudente énumère sans états d’âme et sur un rythme haletant son passé, ses amants successifs et la série de désillusions qui ont fait de la petite oie de province un peu grassouillette qu’elle était à quinze ans la starlette sans complexes qui débarque dans la vie de Karl pour lui soutirer les deux millions d’euros dont Strabanzer a besoin pour boucler son projet. (La chose a été évoquée lors du fameux dîner à trois, Karl l’a enregistrée avec quelque défiance). " Je t’admire " commente Karl, une phrase que les personnages masculins de Martin Walser distribuent indifféremment à leurs femmes ou maîtresses, l’essentiel étant de ne pas faire de jalouses (dieu merci, on ne me sert pas la même chose, se prend à penser Karl von Kahn, dans un léger accès de cynisme). Karl, lui, évoque longuement la capitalisation des intérêts qui fait son quotidien: c’est la version sublimée de l’argent, un moyen d’atteindre le divin, explique-t-il avec exaltation à Joni qui finit par s’endormir. Le lendemain matin, on passe aux choses sérieuses. Karl ne s’en tire pas trop mal. Joni le stimule avec des mots crus que Karl répète avec application et l’on assiste à une étonnante performance verbale à la fois lyrique et pornographique (Joni aime parler en vers et elle écrit des poèmes.) Tous deux sortent émus et repus de cet accouplement hors du commun. Joni déclare avoir connu son premier orgasme…

Les meilleures choses ont une fin. Tandis que Joni file sur Berlin pour le tournage du film, Karl rentre au bercail, un rien penaud et ne trouve rien de mieux que de proposer à Helen, au nom de la morale, pense-t-il (!), de faire l’amour avec lui, comme ça, de but en blanc, sans tenir compte des rites en usage dans leur couple. Helen s’exécute, absente: " Ce fut un coït grotesque, jusqu’au bout il resta grave, violent et seul. Quand tout fut fini, il la remercia afin de le lui faire sentir ". Face à ce qu’elle avait bien ressenti comme une détresse, Helen " lui avait pour ainsi dire donné une consultation de soutien ". Cette solidarité, déjà bien molle, ne va pas durer. Karl se retrouve doublement floué. Joni le quitte après avoir empoché l’argent qui fera d’elle, espère-t-elle, la grande star du moment. Elle n’est pas récompensée lors de la Berlinale, mais sa photo inonde la presse à sensation. Karl von Kahn reçoit une lettre de son successeur, un certain Arthur Dreist au nom prédestiné, auquel Joni fait croire qu’il lui a fait découvrir l’orgasme… Helen, qui s’est étonnée une fois de ce que Karl, pourtant comblé par ses talents de fine cuisinière, se gave de poulet à l’extérieur (la pauvre ne croit pas si bien dire), finit, ayant eu vent de l’histoire avec Joni, par le planter là. Un jour où Karl l’aperçoit devant la joaillerie où ils ont acheté leurs alliances, elle le gifle vigoureusement, Karl tend l’autre joue. Une scène qui illustre le point de vue paradoxal que défend Karl von Kahn dans sa lettre à Helen qui clôt le roman: on peut être coupable sans se sentir coupable - où l’on retrouve, transposées dans la sphère privée, les thèses récemment défendues par l’auteur à propos de la shoah). Il est vieux, soit, ridicule, soit, mais il revendique encore et toujours le droit d’aimer comme à vingt ans : " Il est certes plus près que jamais de la mort, mais il n’est pas plus éloigné de la vie qu’il y a trente ans. La vie continue d’être cette chose dont on n’est jamais rassasié ". On retrouve ici l’incroyable vitalité du Walser de trente ans qui ambitionnait dans ses journaux, récemment publiés sous le titre Leben und Schreiben, d’" engloutir le monde comme on engloutirait tout un champ de fraisiers ".

Le roman de Walser est souvent drôle. Comme dans Der Augenblick der Liebe, la différence d’âge entre les deux partenaires est source de comique. Karl von Kahn, amoureux transi en proie à une jalousie morbide, fouille sans retenue dans le passé de sa partenaire qu’il harcèle de questions, au grand étonnement de celle-ci, peu habituée à ce qu’on lui manifeste autant d’intérêt. Karl n’est pas tendre avec ses congénères, dont il est pourtant solidaire. Il connaît comme eux les misères et la décrépitude de l’âge, mais ne partage pas leur résignation, leurs comportements grégaires et souvent hébétés. C’est un homme riche et puissant, mais avec des failles et des doutes, une personnalité complexe, comme celle de son auteur. Socialement fragile parce que sa notoriété en fait un personnage exposé, une proie pour les intrigants, les envieux, incompris aussi, même par sa femme Helen, qui voit en lui un homme qui fait de l’argent (" ein Geldmensch "), sans plus, alors que ce qui compte à ses yeux, ce n’est pas l’argent, mais la pratique abstraite de la multiplication de l’argent. Fasciné par son personnage, Walser dépeint avec son acuité et son ironie coutumières le monde de la spéculation boursière et retrace avec gourmandise ces réussites spectaculaires.

Derrière le masque social, il y a le doute et la solitude: " Tu es un solitaire, Du bist ein Solitär ", lui dit d’emblée la fine mouche de Joni. Les octogénaires qui reçoivent tous les vendredis les bulletins de Karl célébrant leur " invulnérabilité " (financière, s’entend) ne savent pas que cet optimisme claironnant est conquis sur un fond de scepticisme et de désespoir. Il n’y a pas les perdants d’un côté, les gagnants de l’autre : " Le temps lui manquait, et il n’avait pas obtenu ce qu’il avait voulu obtenir " constate Karl. C’est un homme sensible qui ressent douloureusement la trahison, pour une vulgaire affaire d’argent, de son ami Diego, et le suicide de son frère Erewein, de dix ans son aîné, relativise le succès des autres. Un suicide qui met fin à une vie " marquée par l’échec " : un propos très dur d’Helen à l’égard de ce frère hanté par le souvenir de ce jour de mai 1945 où, à peine âgé de vingt ans, il a tué - réflexe de survie - trois soldats russes pour échapper à la captivité. L’échec ou l’ombre du succès, comme le mensonge est l’ombre de la vérité aux yeux de Karl, lecteur de Montaigne. Ce nouveau roman, dans lequel Martin Walser, homme de la profusion, travaille une fois de plus sans filet et jongle avec les paradoxes, est décidément un grand cru.

De la faune berlinoise à la faune du désert :
Der längste Tag des Jahres de Tanja Dückers

Nous sommes en juin, il fait chaud à Berlin, une chaleur caniculaire comme partout en Europe cette année-là. Bennie et Nana, un jeune couple sans le sou, rénovent un appartement dans lequel ils viennent d’emménager lorsque le téléphone sonne: le père du garçon vient de mourir subitement. Ainsi commence le dernier livre de Tanja Dückers, Der längste Tag des Jahres. La romancière suit à travers différents flash-back les réactions que cette nouvelle provoque chez les cinq enfants du défunt, deux filles et trois garçons aux parcours différents évoqués tour à tour dans les cinq chapitres du livre. C’est, depuis les années d’après-guerre jusqu’à aujourd’hui, l’histoire d’une famille allemande dominée par la figure du père. Ce personnage curieux, autoritaire, vital et introverti, est fasciné par le désert, une passion qu’il a nourrie quotidiennement pendant les longues années où il a tenu un commerce d’animaux du désert: reptiles sournois à la taille impressionnante, caméléons, lézards divers, insectes géants,
une faune inquiétante qui envahit la demeure familiale, occupant le patriarche de manière exclusive jusqu’à ce que la boutique périclite.

Née à Berlin-Ouest en 1968, Tanja Dückers n’est plus une débutante. Elle apparaît sur la scène berlinoise à la fin des années 90, comme l’une des représentantes de ce fameux " literarisches Fräuleinwunder " où l’on voyait de jeunes femmes conquérantes partir sans complexes à l’assaut du marché du livre dans la nouvelle capitale en pleine effervescence. C’est du reste à Berlin que se déroulait Spielzone, le premier roman qu’elle publie en 1999. On y découvrait un Berlin underground caricatural, peuplé d’adolescentes narcissiques en quête de sexe, de marginaux exhibitionnistes et paumés, d’individus excentriques. Une faune bigarrée pour ne pas dire criarde, qu’on nous montrait déambulant à travers les lieux branchés du Prenzlauerberg dans une succession de scènes lassantes et convenues.

Les choses n’en sont pas tout-à-fait restées là.. Le Fräuleinwunder a pris quelques rides et la narratrice et mûri entre temps. Der längste Tag des Jahres traite d’un sujet plus original que ce premier roman pubertaire. Tanja Dückers aime les ambiances glauques. A travers les souvenirs qui affluent chez les cinq protagonistes, elle a su rendre sensible l’atmosphère oppressante dans laquelle ils ont grandi en Bavière, confinés dans la petite ville étriquée de Fürstenfeldbrück. La mère, inexistante, reléguée à la cuisine, le père envahissant, intarisssable quand il y va de son tic, occupant tout l’espace de la maison aménagée en serre tropicale, son bureau, froid, " masculin ", avec pour uniques décorations une vue du désert dominée par la tête d’un énorme serpent lové dans le sable et tout à côté, la photo du grand-père à l’allure impérieuse. Un militaire en tenue tropicale dont on apprend plus tard qu’il est mort au cours de l’expédition de Rommel en Afrique

Cette saga familiale sur fond d’histoire allemande prolonge- y aurait-t-il là un filon à exploiter ?- le précédent livre de Tanja Dückers, Himmelskörper, paru en 2004. Tournant le dos à ses débuts turbulents, la narratrice formait le projet d’évoquer le passé allemand de façon distanciée au nom de " sa génération ", celle des petits-enfants soucieux de comprendre et non plus d’accuser. L’héroïne du livre, la météorologue Freia, attend un enfant. Prise du besoin de réfléchir sur sa propre histoire, elle en vient à faire la lumière sur un secret de famille. C’est grâce aux liens étroits qu’ils entretenaient avec le parti nazi que ses grands-parents fuyant Königsberg ont pu monter à bord d’un démineur de la marine nazie Ils embarquaient sinon sur le Wilhelm Gustloff où ils auraient péri avec des milliers d’autres fugitifs (cet épisode de l’histoire allemande avait déjà été traité par Grass dans Im Krebsgang (2002)).Tanja Dückers n’a pas toujours les moyens de ses ambitions. On lui a reproché le style négligé et la psychologie sommaire de son livre, ainsi que sa manière superficielle d’aborder le sujet.

Der längste Tag des Jahres marque un progrès par rapport au roman qui l’a précédé. Certes, T. Dückers n’a pas complètement rompu avec la naïveté de ses débuts. Elle ne cache pas son faible pour tout ce qui est " chic ", les gens " intéressants ", artistes, comédiens, galeristes, ceux qui pensent et qui créent, jette un regard condescendant sur les gens " normaux " besogneux, obligés- quelle horreur- de se rendre au bureau dès 9 heures, se gausse des seniors forcément bedonnants et hargneux, autant de clichés qui agacent. Mais elle laisse habilement planer autour de cet étrange père de famille un mystère évoqué dans les questions que se posent les enfants devenus adultes: pourquoi cette inquiétante monomanie, cette fuite, cette régression dans un univers hors du temps, pourquoi, alors que d’autres, dans sa génération, se politisaient, protestaient contre la guerre au Vietnam, préférait-il le cadre rassurant du Heimatverband local ? Pourquoi esquivait-il toute question ayant trait à la guerre et au passé allemand ? Et qu’en est-il de la disparition inexpliquée, à l’âge de vingt ans, du benjamin de la famille, Thomas, le fils chéri du père que celui-ci avait inlassablement nourri de ses fantasmes ?

Ces interrogations génèrent un suspense qui trouve sa solution dans le chapitre final où réapparaît le fils disparu. Celui-ci, après quelques errances, devient ingénieur à New Mexiko, qu’il quitte pour atterrir en plein désert de Californie où il se fixe avec femme et enfant, non loin d’un terrain militaire où s’entraînaient les soldats américains qu’on envoyait de battre en Afrique contre Rommel.. Une issue qui renoue avec le premier chapitre du roman où la thématique du désert occupait le premier plan. Avec une puissance de suggestion qui tranche sur la platitude des chapitres qui précédent, T. Dückers introduit le lecteur dans un univers étrange, saisissant, un monde fantasmagorique. Installé dans un mobil-home au centre d’un cimetière d’avions, Thomas, devenu membre des Sun people. - tout ceci est précisément documenté,- passe ses journées à fixer le paysage de fin du monde qu’il a sous les yeux, aux côtés de Sami, son " fils du désert " âgé se sept ans … reproduction ironique de la situation qu’il a connue enfant sur les genoux de son père, un père dont il avait voulu fuir l’emprise à vingt ans, à moins que ce ne soit l’emprise du père qui ait fini par le pousser vers le désert.

T. Dückers ne manque pas d’idées. Ce dernier chapitre très dense aurait à lui seul fait un bon livre. A travers cette thématique du désert, le rapport au passé nazi de la troisième génération est traité ici avec subtilité. La "mélancolie du désert " que savoure le fils avec un plaisir narcissique reproduit la " German Weltflucht " du père obnubilé par ses reptiles. L’apathie d’une vie allemande marquée par l’histoire. Ayant appris le décès du père, Thomas téléphone longuement à son frère Bennie- un retour habile au début du roman. Et se surprend pour finir à lancer à son fils médusé qui ne parle qu’anglais cette phrase que les enfants allemands s’amusent à répéter: " Fischers Fritze fischt frische Fische… ". Une manière plaisante de renouer malgré lui avec ses racines et d’ aborder peut-être enfin avec quelque légéreté, à travers cette réminiscence anodine, un passé encombrant qu’il a fallu à tout prix gommer. Peut-être, car lorsque le fils questionne son père pour en savoir plus sur cette phrase aux sonorités étranges, le père lui répond : " Je ne sais pas ".

- Chantal SIMONIN -

Références bibliographiques

Walser, Martin, Tod eines Kritikers, Frankfurt/Main (Suhrkamp) 2002, 220 p.
Leben und Schreiben. Tagebücher 1951-1962. Rowohlt, Reinbek b.Hamburg, 2005,666 p.
Der Augenblick der Liebe. Rowohlt Taschenbuch Verlag, Reinbeck b. Hamburg,
janvier 2006, 253 p.
Angstblüte, Rowohlt Verlag, Reinbek b. Hamburg, juillet 2006,476 p.

Dückers, Tanja, Spielzone, Berlin, Aufbau Tb. 1694,1999.
Himmelskörper, Berlin, Aufbau Tb. 2063, 2003 (Aufbau-Verlag 2000).
Der längste Tag des Jahres, Aufbau-Verlag, Berlin 2006, 211 p.


Les notes de lecture de J.C. François


Index des auteurs publiés et des auteurs traités

AUTEURS PUBLIES

ALLAL, M., 178/98-113, (Le crime des " pères " ? Regards 'genrés' sur le passé national-socialiste dans le roman allemand contemporain).
BAISEZ, O., 175/134-147, (La politique culturelle des Français et des Britanniques en matière de théâtre, Berlin 1945-1949).
BELLAN, M., 176/59-68, (Berlin et la " Nouvelle Vague " du cinéma allemand).
BENOIT, M., 176/201-202, (CR V. von Wroblewsky).
BESSLICH, B., 178/15-31, (La narration non fiable au service de la mémoire. Perspectives sur le national-socialisme chez Maxim Biller, Marcel Beyer et Martin Walser).
BOSSIS, R., 177/162-181, (Greffiers en France et en Allemagne).
BOUILLOT, C., 178/68-82, (En crabe de Günter Grass et le débat médiatique sur la question des expulsions).
BOURNIZIEN, E., 176/139-158, (Mail Art (art postal) : une tendance artistique alternative et son rôle social en RDA).
BRAND, E., 176/37-48, (" Il est plus facile pour un scénariste de devenir romancier que pour un romancier de devenir scénariste ").
BRODERSEN, H., 175/49-60, (Un programme économique entre pansements et vraies réformes).
CANDONI, J.-F., 175/156-162, (Le 11e Congrès de l’association internationale / Internationale Vereinigung für Germanistik, Paris, 26-08 – 3-9-2005).
CARRE, V., 176/69-88, (Le nouveau cinéma allemand et le cinéma actuel : des thèmes communs pour un traitement divergent).
CHARRIER, L., 177/192-194, (CR J. Fest).
COLIN, N., 178/129-142, (Naissance tardive et secrets de famille: le rapport des petits-enfants au passé dans les romans de Tanja Dückers, Michael Wildenhain, Dgmar Leupold et Irene Dische) ; 178/175-183 (Martin Walser et l’antisémitisme littéraire. Le germaniste M.N. Lorenz déclenche un nouveau débat).
DEMANDRE, J.-L., HS/5-6, (Préface, 8 mai 1945 – 8 mai 2005. France et Allemagne : de la guerre au partenariat européen. Actes du colloque de Verdun, centre mondial de la paix 8 mai 2005).
DURCHSCHLAG, R., 176/26-36, (" Les grands metteurs en scène de la génération des années 70 sont loin de nous).
FERLAN, F., 178/190-212, (De 1946 à 2006, l’héritage du droit de Nuremberg : tribunaux pénaux internationaux et incriminations).
FRANCOIS, J.-C., 175/114-115 (CR D. Arnold, M. Koplek, J. Brethomé) ; 175/163-170 (Notes de lecture) ; 176/179 (Notes de lecture) ; 176/180 (Quelques statistiques significatives sur le théâtre en Allemagne).
GEORGET, J.-L., 176/3-6, (Le cinéma allemand à l’aune des bouleversements sociaux ou les jalons d’une renaissance).
HÄHNEL-MESNARD,C., 176/181-186, (Chronique littéraire et culturelle) ; 177/129-146, (Les revues littéraires auto-éditées en RDA dans les années 1980 comme espace non censuré) ; 178/3-14, (Le rapport au passé national-socialiste et à la Seconde Guerre mondiale dans la littérature allemande contemporaine : contextes et expressions).
HERBET, D., 176/205-206, (CR M. Mombert).
HERVE, F., 176/159-172, (Le creux de la vague ? Le mouvement des femmes en Allemagne).
HOLLER, V., 178/50-67, (Histoire, mémoire et oubli : Chassés de l’enfer de Robert Menasse).
HUSSON, E., 176/187-188, (CR R. Misch).
KAÏSER-GUERIN, C., 176/89-100, (" Good Bye Lenin " ou le pouvoir mystificateur des voix off et médiatisées).
KIMMEL, A., HS/5-6, (Préface, 8 mai 1945 – 8 mai 2005. France et Allemagne : de la guerre au partenariat européen. Actes du colloque de Verdun, centre mondial de la paix 8 mai 2005) ; HS/22-35, (Les relations politiques : le revirement français sur la question allemande).
KNOPPER, F., 176/203-204, (CR C. Bouillot et P. Pasteur).
LAMENIE, B., 175/90-106, (Comment se prépare un conseil des ministres franco-allemand ?).
LEMONNIER-LEMIEUX, A., 177/73-88, (Les écrivains est-allemands et les romantiques).
LENZ-MICHAUD, S., 176/116-138, (Révélations brutales. La violence dans les " romans berlinois " des jeunes auteurs contemporains : tendance de la narration postmoderne).
LESTRADE, B., 175/33-48, (Hartz IV – Une réforme contestée) ; 177/147-161, (La politique de l’emploi de la grande coalition : priorité au secteur à bas salaires).
MARIOTTE, C., 178/159-176, (Une mémoire marginale ? Secrets trahis et réévaluation du passé dans les œuvres de fiction récentes de trois écrivains juifs allemands).
MARTENS, S., 175/61-74, (Quelle continuité pour la politique étrangère de la Grande coalition ?) ; 175/107-114, (CR F. Baasner, J.-F. Simonart, R. Friedrich, W. Kilian, H. Kohl) ; HS/36-50, (De l’Erbfeindschaft à la réconciliation. Le Traité de l’Elysée. Portée et limites) ; 176/187-188, (CR R. Misch) ; 176/188-201, (CR S. Böckenförde, D. van Laak, M. Miegel, O.W. Gabriel, J. Willms, M. Mazower, A. Grau , G. Koenen, C. Nourry) ; 177/182-191, (C. Hocq, G. Graiche, H. Gründer, H.P. Schwarz, G. Hellmann, W. von Bredow, V. Kronenberg).
MEDICUS, T., 178/83-97, (" Comprendre et non pas accuser, sans pardonner " - Retour sur le passé à l’époque de la post-mémoire. Un entretien conduit par C. Hähnel-Mesnard).
MENUDIER, H., 178/213-220, (Berlin et Mecklembourg-Poméranie occidentale : élections régionales et recul des grands partis).
METZGER, C., HS/51-67, (La réconciliation franco-allemande vue de RDA).
MIARD-DELACROIX, H., 175/17-32, (Où en est le parti social-démocrate ?).
MILLOT, C., 178/143-158, (Porcelaine de Durs Grünbein. Un enfant de l’après-guerre face à la destruction de Dresde ou les difficultés du devoir de mémoire).
MIRSKY, D., 177/117-128, (La presse satirique de RDA à la fin des années 1980 : la revue Eulenspiegel entre censure et autocensure).
MOINE, C., 177/58-72, (Un cinéaste est-allemand en marge ? Volker Koepp au festival international de Leipzig) .
MORTIER, J., 177/18-38, (Création musicale et politique culturelle dans les années cinquante en RDA).
NEAU, P., 176/176-178, (CR C. Simonin).
OTTOMEYER-HERVIEU, C., 176/159-172, (Le creux de la vague ? Le mouvement des femmes en Allemagne).
PAILHES, A.-M., 177/6-17, (Formation ou mise au pas des élites en RDA ? L’exemple de l’Institut de Littérature de Leipzig).
PERLWITZ, R., 175/156-162, (Le 11e Congrès de l’association internationale / Internationale Vereinigung für Germanistik, Paris, 26-08 – 3-9-2005).
PESNEL, S., 175/156-162, (Le 11e Congrès de l’association internationale / Internationale Vereinigung für Germanistik, Paris, 26-08 – 3-9-2005).
POUMET, J., 177/3-5, (Présentation du dossier Pratiques et productions culturelles en RDA) ; 177/39-57, (Le contournement des préceptes officiels dans les arts plastiques de RDA).
REUTTER, W., 175/4-16, (" Oser plus de liberté ? " La nouvelle chancelière d’Allemagne).
ROBIN, C., 176/101-115, (" La chute " ou les dessous d’une polémique).
ROTHMUND, E., 175/156-162, (Le 11e Congrès de l’association internationale / Internationale Vereinigung für Germanistik, Paris, 26-08 – 3-9-2005).
SCHILD, J., HS/ 92-103, (Quelle vision de l’Europe ? Les choix institutionnels et politiques de la France et de l’Allemagne).
SCHIRMANN, S., HS/68-81, (L’économie, un facteur de la coopération franco-allemande ?).
SCHWARZ, U., 176/49-58, (" Un scénariste capable d’exercer son métier " : l’Ecole internationale du film de Cologne).
SFORZIN, M., 176/175-176, (CR E. Tunner).
SIMONIN, C., 175/148-175, (Carnet littéraire).
STARK, H., HS/104-111, (La France et l’Allemagne face à l’Europe de l’Est).
SUARD, E., 176/7-25, (" Goût français, goût allemand ").
TAMBARIN, M., 175/117-133, (Des films qui font l’histoire ? De quelques productions récentes du cinéma allemand sur le IIIe Reich) ; 178/32-49, (Une source vive de Martin Walser ou le passé comme si c’était le présent).
TAURECK, M., 178/114-128, (Meines Vaters Land de Wibke Bruhns).
THAISY, L., 175/115-116, (CR J.-C. Notin, W. Jacobsen/A. Kaes, H.H. Prinzler).
THOREL, J., 175/75-89, (Le débat allemand autour de la question turque).
VAILLANT, J., 175/3, (Les premiers pas de la grande coalition) ; HS/5-6, (Préface, 8 mai 1945 – 8 mai 2005. France et Allemagne : de la guerre au partenariat européen. Actes du colloque de Verdun, centre mondial de la paix 8 mai 2005) ; HS/7-21, (Le 8 mai 1945 dans nos mémoires collectives : victoire, défaite, libération ; nouveau départ) ; 176/173-174, (Hommage à Marieluise Christadler) ; 177/191-192, (CR J.-P. Hammer) ; 178/184-189, (Limites et portée de l’aveu tardif de Günter Grass).
VALENTIN, J.-M., 175/156-162, (Le 11e Congrès de l’association internationale / Internationale Vereinigung für Germanistik, Paris, 26-08 – 3-9-2005).
VERDALLE, L. de, 177/103-116, (Les théâtres de RDA à la fin des années 1980. Entre démocratisation et politisation de l’art théâtral).
VOGEL, W., HS/82-91, (Le couple franco-allemand : un modèle pour les autres ? Une esquisse de recherche).
YECHE, H., 177/89-102, (Die Puhdys, rock socialiste et identitaire à l’Est).


AUTEURS TRAITES

Adorno, T., 178/98-113, (Le crime des " pères " ? Regards ‘genrés’ sur le passé national-socialiste dans le roman allemand contemporain, par M. Allal).
Arendt, H., 178/98-113, (Le crime des " pères " ? Regards ‘genrés’ sur le passé national-socialiste dans le roman allemand contemporain, par M. Allal).
Arnold, D., 175/114, (Neue Reichskanzlei und " Führerbunker ", Legenden und Wirklichkeit, CR de J.-C. François).
Aufenanger, J., 175/167, (Heinrich Heine in Paris, CR de J.-C. F.).
Baasner, F., 175/107, (Gérer la diversité culturelle. Théorie et pratique de la communication interculturelle en contexte franco-allemand, CR de S. Martens).
Benjamin, W., 178/143-158, (Porcelaine de Durs Grünbein. Un enfant de l’après-guerre face à la destruction de Dresde ou les difficultés du devoir de mémoire, par C. Millot).
Benn, G., 178/98-113, (Le crime des " pères " ? Regards ‘genrés’ sur le passé national-socialiste dans le roman allemand contemporain, par M. Allal).
Beyer, M., 178/15-31, (La narration non fiable au service de la mémoire. Perspectives sur le national-socialisme chez Maxime Biller, Marcel Beyer et Martin Walser, par B. Bessblich).
Biller, M., 178/15-31, (La narration non fiable au service de la mémoire. Perspectives sur le national-socialisme chez Maxime Biller, Marcel Beyer et Martin Walser, par B. Bessblich).
Böckenförde, S., 176/188-190, (Chancen der deutschen Aussenpolitik. Analysen – Perspektiven – Empfehlungen, par S. Martens).
Bongartz, B., 178/98-113, (Le crime des " pères " ? Regards ‘genrés’ sur le passé national-socialiste dans le roman allemand contemporain, par M. Allal).
Böthig, P., 177/195-103, (Carnet littéraire de C. Simonin).
Bouillot, C., 176/203-205, (Femmes, féminismes et socialismes dans l’espace germanophone après 1945, CR de F. Knopper).
Brandt, L., 177/195-103, (Carnet littéraire de C. Simonin).
Bredow, W. von, 177/187-189, (Die Aussenpolitik der Bundesrepublik Deutschland. Eine Einführung, CR de S. Martens).
Brethomé, J., 175/115, (La langue de l’autre – Histoire des professeurs d’allemand des lycées (1850-1880), CR de J.-C. François).
Browning, C., 178/98-113, (Le crime des " pères " ? Regards ‘genrés’ sur le passé national-socialiste dans le roman allemand contemporain, par M. Allal).
Bruhns, W., 178/114-128, (Meines Vaters Land de Wibke Bruhns, par M. Taureck).
Carl, W., 178/98-113, (Le crime des " pères " ? Regards ‘genrés’ sur le passé national-socialiste dans le roman allemand contemporain, par M. Allal).
Cozic, A., 176/176, (Traversées du miroir. Mélanges offerts à Erika Tunner, CR de M. Sforzin).
Dische, I., 178/129-142, (Naissance tardive et secrets de famille : le rapport des petits-enfants au passé dans les romans de Tanja Dückers, Michael Wildenhain, Dagmar Leupold et Irene Dische, par N. Colin).
Dückers, T., 178/129-142, (Naissance tardive et secrets de famille : le rapport des petits-enfants au passé dans les romans de Tanja Dückers, Michael Wildenhain, Dagmar Leupold et Irene Dische, par N. Colin).
Falter, J.W., 176/193-194, (Wächst zusammen, was zusamengehört ? Stabiltät und Wandel politischer Einstellungen im wiedervereinigten Deutschland, CR de S. Martens).
Fest, J., 177/192-194, (Die unbeantwortbaren Fragen. Gespräche mit Albert Speer, CR de L. Charrier).
Frahm, O., 178/15-31, (La narration non fiable au service de la mémoire. Perspectives sur le national-socialisme chez Maxime Biller, Marcel Beyer et Martin Walser, par B. Bessblich).
Friedrich, R., 175/109-110, (Die deutsche Assenpolitik im Kosovo-Konflikt, CR de S. Martens).
Fühmann, F., 178/184-189, (Limites et portée de l’aveu tardif de Günter Grass, par J. Vaillant).
Gabriel, O.W., 176/193-194, (Wächst zusammen, was zusamengehört ? Stabiltät und Wandel politischer Einstellungen im wiedervereinigten Deutschland, CR de S. Martens).
George, S., 178/143-158, (Porcelaine de Durs Grünbein. Un enfant de l’après-guerre face à la destruction de Dresde ou les difficultés du devoir de mémoire, par C. Millot).
Giordano, R., 178/184-189, (Limites et portée de l’aveu tardif de Günter Grass, par J. Vaillant).
Goubet, J.-F., 175/167-168, (Aux sources de l’esthétique – Les débuts de l’esthétique philosophique en Allemagne, CR de J.-C. François).
Graichen, G., 177/183-184, (Deutsche Kolonien. Traum und Trauma, CR de S. Martens).
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Grau, A., 176/1197-199, (" Gegen den Strom ". Die Reaktion der CDU/CSU-Opposition auf die Ost- und Deutschlandpolitik der sozial-liberalen Koalition 1969-1973, CR de S. Martens).
Grünbein, D., 178/143-158, (Porcelaine de Durs Grünbein. Un enfant de l’après-guerre face à la destruction de Dresde ou les difficultés du devoir de mémoire, par C. Millot).
Grünberg, K., 178/15-31, (La narration non fiable au service de la mémoire. Perspectives sur le national-socialisme chez Maxime Biller, Marcel Beyer et Martin Walser, par B. Bessblich).
Gründer, H., 177/183-184, (Deutsche Kolonien. Traum und Trauma, CR de S. Martens).
Hage, V., 178/15-31, (La narration non fiable au service de la mémoire. Perspectives sur le national-socialisme chez Maxime Biller, Marcel Beyer et Martin Walser, par B. Bessblich).
Hammer, J.-P., 177/191-192, (Destination Madagascar. Saumur, Paris, Tananarive. Des coulisses du PC au grand soleil de l’Ile rouge, CR de J. Vaillant).
Heer, H., 178/98-113, (Le crime des " pères " ? Regards ‘genrés’ sur le passé national-socialiste dans le roman allemand contemporain, par M. Allal).
Heine, H., 175/166-167, Deutschland ein Wintermärchen ; Buch der Lieder ; Mein Leben (CR de J.-C. François) ; 176/179, (Deutschland ein Wintermärchen, notes de lecture de J.-C. François).
Hensel, J., 178/15-31, (La narration non fiable au service de la mémoire. Perspectives sur le national-socialisme chez Maxime Biller, Marcel Beyer et Martin Walser, par B. Bessblich).
Hilberg, R., 178/98-113, (Le crime des " pères " ? Regards ‘genrés’ sur le passé national-socialiste dans le roman allemand contemporain, par M. Allal).
Hocq, C., 177/182-183, (Dictionnaire d’histoire politique du 20e siècle, CR de S. Martens).
Humblot, H., 178/184-189, (Limites et portée de l’aveu tardif de Günter Grass, par J. Vaillant).
Jacobsen, W., 175/116, (Geschichte des deutschen Films, CR de L. Thaisy).
Jochmann, W., 178/98-113, (Le crime des " pères " ? Regards ‘genrés’ sur le passé national-socialiste dans le roman allemand contemporain, par M. Allal).
Kaes, A., 175/116, (Geschichte des deutschen Films, CR de L. Thaisy).
Kehlmann, D., 176/181-186, (Chronique littéraire et culturelle de C. Hähnel-Mesnard).
Keller, H., 175/168, (Lexikon der Heiligen und biblischen Gestalten, CR de J.-C. François).
Kempowski, W., 178/143-158, (Porcelaine de Durs Grünbein. Un enfant de l’après-guerre face à la destruction de Dresde ou les difficultés du devoir de mémoire, par C. Millot).
Kilian, W. 175/110-111, (Adenauers Reise nach Moskau, CR de S. Martens).
Klemperer, V., 178/143-158, (Porcelaine de Durs Grünbein. Un enfant de l’après-guerre face à la destruction de Dresde ou les difficultés du devoir de mémoire, par C. Millot).
Koenen, G., 176/199-200, (Der Russland-Komplex. Die Deutschen und der Osten 1900-1945, CR de S. Martens).
Kohl, H., 175/112-114, (Erinnerungen 1982-1990, CR de S. Martens).
Koplek, M., 175/114, (München 1933-1945, Stadtführer zu den Spuren der Vergangenheit, CR de J.-C. François).
Kronenberg, V., 177/189-191, (Patriotismus in Deutschland. Perspektiven für eine weltoffene Nation, CR de S. Martens).
Laak, D. van, 176/190-192, (Über alles in der Welt. Deutscher Imperialismus im 19. und 20. Jahrhundert, CR de S. Martens).
Lajarrige, J., ., 176/176, (Traversées du miroir. Mélanges offerts à Erika Tunner, CR de M. Sforzin).
Lang, T., 176/181-186, (Chronique littéraire et culturelle de C. Hähnel-Mesnard).
Leupold, D., 178/98-113, (Le crime des " pères " ? Regards ‘genrés’ sur le passé national-socialiste dans le roman allemand contemporain, par M. Allal) ; 178/129-142, (Naissance tardive et secrets de famille : le rapport des petits-enfants au passé dans les romans de Tanja Dückers, Michael Wildenhain, Dagmar Leupold et Irene Dische, par N. Colin).
Levy, B.-H., 178/184-189, (Limites et portée de l’aveu tardif de Günter Grass, par J. Vaillant).
Mann, H., 176/176-178, (Heinrich Mann et la France. Une biographie intellectuelle, CR de P. Neau).
Mazover, M., 176/196-197, (Le Continent des ténèbres. Une histoire de l’Europe au 20e siècle, CR de S. Martens).
Menasse, R., 178/50-67, (Histoire, mémoire et oubli : Chassés de l’enfer de Robert Menasse, par V. Holler).
Miegel, M., 176/192, (Epochenwende. Gewinnt der Westen die Zukunft ?, CR de S. Martens).
Misch, R., 176/187-188, (J’étais garde du corps d’Hitler. 1940-1945, CR de E. Husson et S. Martens).
Mitscherlich, M. et A., 178/98-113, (Le crime des " pères " ? Regards ‘genrés’ sur le passé national-socialiste dans le roman allemand contemporain, par M. Allal).
Mombert, M., 176/205-206, (L’enseignement de l’allemand – 19e-21e siècles, in Revue de l’Histoire de l’éducation, CR de D. Herbet).
Naumann, K., 178/98-113, (Le crime des " pères " ? Regards ‘genrés’ sur le passé national-socialiste dans le roman allemand contemporain, par M. Allal).
Neutwich, A., 178/15-31, (La narration non fiable au service de la mémoire. Perspectives sur le national-socialisme chez Maxime Biller, Marcel Beyer et Martin Walser, par B. Bessblich).
Notin, J.-C., 175/115, (Les vaincus seront les vainqueurs – La France en Allemagne (1945), CR de L. Thaisy).
Nourry, C., 176/200-201, (Le couple franco-allemand : un symbole européen, CR de S. Martens).
Pasteur, P., 176/203-205, (Femmes, féminismes et socialismes dans l’espace germanophone après 1945, CR de F. Knopper).
Prinzler, H.H., 175/116, (Geschichte des deutschen Films, CR de L. Thaisy).
Rattinger, H., 176/193-194, (Wächst zusammen, was zusamengehört ? Stabiltät und Wandel politischer Einstellungen im wiedervereinigten Deutschland, CR de S. Martens).
Raulet, G., 175/167-168, (Aux sources de l’esthétique – Les débuts de l’esthétique philosophique en Allemagne, CR de J.-C. François).
Rilke, C., 178/143-158, (Porcelaine de Durs Grünbein. Un enfant de l’après-guerre face à la destruction de Dresde ou les difficultés du devoir de mémoire, par C. Millot).
Roggenkamp, V., 178/15-31, (La narration non fiable au service de la mémoire. Perspectives sur le national-socialisme chez Maxime Biller, Marcel Beyer et Martin Walser, par B. Bessblich).
Rössler, G., 176/195-196, (Mein Leben in vielen Akten. Aufgeschrieben von Uta Koleno, CR de S. Martens).
Rothmund, E.,
Scheub, U., 178/98-113, (Le crime des " pères " ? Regards ‘genrés’ sur le passé national-socialiste dans le roman allemand contemporain, par M. Allal).
Schlink, B., 177/195-103, (Carnet littéraire de C. Simonin).
Schnitzler, A., 175/164, (Professor Bernhardi, CR de J.-C. François).
Schmidt, K., 176/181-186, (Chronique littéraire et culturelle de C. Hähnel-Mesnard).
Schmittlein, R., 178/184-189, (Limites et portée de l’aveu tardif de Günter Grass, par J. Vaillant).
Schreiber, J., 178/98-113, (Le crime des " pères " ? Regards ‘genrés’ sur le passé national-socialiste dans le roman allemand contemporain, par M. Allal).
Schwarz, H.P., 177/184-186, (Republik ohne Kompaß. Anmerkungen zur deutschen Außenpolitik, CR de S. Martens).
Seligmann, R., 178/15-31, (La narration non fiable au service de la mémoire. Perspectives sur le national-socialisme chez Maxime Biller, Marcel Beyer et Martin Walser, par B. Bessblich).
Simonart, J.-F., 175/107-109, (Russie, Etats-Unis : partenaires de l’Allemagne, CR de S. Martens).
Simonin, C., 176/176-178, (Heinrich Mann et la France. Une biographie intellectuelle, CR de P. Neau).
Stern, C., 178/184-189, (Limites et portée de l’aveu tardif de Günter Grass, par J. Vaillant).
Süsskind, P., 177/195-103, (Carnet littéraire de C. Simonin).
Tunner, E., 176/175-176, (Thomas Bernhard. Un joyeux mélancolique, Paris – Carrefours de rencontres. De Stefan Zweig à Christa Wolf. Les littératures allemandes et autrichiennes au 20e siècle, CR de M. Sforzin).
Waffender, C., 178/98-113, (Le crime des " pères " ? Regards ‘genrés’ sur le passé national-socialiste dans le roman allemand contemporain, par M. Allal).
Walser, M., 178/15-31, (La narration non fiable au service de la mémoire. Perspectives sur le national-socialisme chez Maxime Biller, Marcel Beyer et Martin Walser, par B. Bessblich) ; 178/32-49, (Une source vive de Martin Walser ou le passé comme si c’était le présent, par M. Tambarin) ; 178/175-183, (Martin Walser et l’antisémitisme littéraire. Le germaniste M.N. Lorenz déclenche un nouveau débat, par N. Colin).
Wildenhain, M., 178/129-142, (Naissance tardive et secrets de famille : le rapport des petits-enfants au passé dans les romans de Tanja Dückers, Michael Wildenhain, Dagmar Leupold et Irene Dische, par N. Colin).
Willms, J., 176/194, (La maladie allemande. Une brève histoire du présent, CR de S. Martens).
Wolf, C., 176/176, (Carrefours de rencontres. De Stefan Zweig à Christa Wolf. Les littératures allemandes et autrichiennes au 20e siècle, CR de M. Sforzin) ; 177/195-103, (Carnet littéraire de C. Simonin).
Zadje, N., 178/15-31, (La narration non fiable au service de la mémoire. Perspectives sur le national-socialisme chez Maxime Biller, Marcel Beyer et Martin Walser, par B. Bessblich).
Zweig, S., 176/176, (Carrefours de rencontres. De Stefan Zweig à Christa Wolf. Les littératures allemandes et autrichiennes au 20e siècle, CR de M. Sforzin).